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Pourquoi le Brexit a eu lieu ?
Introduction
Le retrait de la Grande-Bretagne de l’Union européenne est un événement international qui mérite d’être étudié pour en déterminer le contexte, les causes et les répercussions possibles, d’autant plus qu’il va à contre-courant de la tendance mondiale qui prévaut à une époque où les pays cherchent généralement à s’engager dans des groupements régionaux et des blocs internationaux pour protéger leurs intérêts économiques, politiques, sécuritaires et stratégiques, et à un moment où de nombreux pays cherchent à atteindre les critères politiques et économiques nécessaires pour rejoindre l’Union européenne, qui impose de tels critères, malgré les problèmes nombreux et variés dont elle souffre.
Cet article vise à explorer les relations entre l’île unie et le continent européen depuis la fin de la guerre mondiale, et l’histoire du «mariage de raison», sans affection, qui les unissait et qui s’est soldé finalement par un divorce baptisé «Brexit[1]». Il vise également à rechercher les véritables arrière-plans de la décision historique britannique, loin des raisons déclarées, en revenant sur les motifs et les racines lointaines de cette décision.
La problématique de cet article réside dans la réponse aux questions suivantes liées les unes aux autres: Loin des prétextes et des raisons invoquées, pourquoi la Grande-Bretagne a-t-elle quitté l’Union européenne? S’agit-il d’intérêts économiques et commerciaux?, de recherche de pouvoir et d’influence? Ou des motifs liés à l’identité? Quels sont les véritables fondements de cette décision? Quelles sont les conséquences futures pour l’UE et la GB?
Pour répondre à ces questions on va faire recours à la méthode analytique descriptive, qui vise à décrire des phénomènes, des événements ou des politiques, à collecter des informations, des faits et des observations à leur sujet, à décrire leurs circonstances et à rendre compte de leur état tel qu’ils existent dans la réalité. Il va falloir aussi s’appuyer sur la méthode historique, qui s’attache à décrire les événements survenus dans le passé de manière qualitative, traitant du suivi, de l’analyse, et de l’interprétation de leurs éléments, et se fonde sur cette description pour comprendre la réalité et anticiper ses tendances futures proches et lointaines. Ceci en suivant le chemin explicatif des théories : néo-réaliste qui se concentre sur les forces et l’influence, le libéralisme utilitariste qui se préoccupe des gains économiques, commerciaux et militaires derrière la décision politique, et le constructivisme fonctionnel qui met l’accent sur les critères de l’identité, la souveraineté, le patriotisme, et d’autres critères de valeur.Le but est de savoir lequel de ces trois directions régit la décision britannique.
La méthodologie s’inspire également de la théorie du rôle née et développée dans le cadre de la sociologie occidentale, et fondée en premier lieu sur des fondements sociaux et psychologiques. Kal Holsti définit le rôle comme «les définitions,par les décideurs, des fonctions que l’État devrait exercer de manière continue, que ce soit dans le système international ou dans le système sous-régional»[2]. Stephen Walker définit le concept du rôle comme «les perceptions des décideurs de politique étrangère des positions de leurs États dans le système international. Le rôle n’est pas seulement une décision, un comportement ou un objectif, mais exprime plutôt un ensemble de fonctions pivots exercées par l’État dans un certain laps de temps»[3].
L’article se divise en trois parties: la première revient aux racines et aux origines du scepticisme britannique à l’égard d’une Europe unie, et la seconde suit l’évolution de l’engagement britannique dans le projet européen depuis ses débuts, avant que la troisième n’essaie d’anticiper ce que serait l’avenir de la nouvelle relation anglo-européenne.
I- Les racines de l’europhobie ou du «scepticisme européen» en Grande-Bretagne.
Il y a des origines profondes dans «l’esprit anglais» derrière le désir de se séparer de l’Europe, comme il y a des raisons directes déclarées. Le «scepticisme européen»[4] en Grande-Bretagne s’est formé à la suite de l’interaction de nombreux facteurs tels que la géographie et l’histoire impériale. Les médias et certains partis et personnalités politiques ont joué dans son effervescence pour s’ancrer dans l’opinion publique et la mémoire collective.
1- Géographie et histoire impériale
Napoléon Bonaparte disait que la politique d’un pays réside dans sa géographie, et le géopolitologue français Paul Vidal de la Blanche croyait que «chaque pays a sa propre histoire géographique», une équation qui s’applique le plus à l’Angleterre, l’île que la Manche sépare du continent européen, et que les Anglais considèrent comme une source de sécurité naturelle. Ces derniers vivent depuis des temps immémoriaux sur une île entourée d’océans, en particulier l’Atlantique qui les séparent de l’Amérique, vers laquelle ils ont transféré leur culture et leur langue, et avec elle ils ont maintenu une alliance solide et continue. Ils ont une vision du continent européen différente de celle des habitants du continent. Dans leur langage populaire, le mot «Europe» signifie «traverser la Manche» vers le continent. L’Anglais dit: «Je voyage en Europe», et c’est ce qui le distingue du Français, allemand ou espagnol, par exemple, qui dit qu’il va en Italie, en Pologne ou ailleurs, et non en Europe. Cela révèle une distinction encore ancrée dans l’imaginaire britannique.
Quant à l’histoire, les tentatives d’invasion de l’île par les rois d’Europe, que les rois d’Angleterre ont réussi à affronter, sont encore dans l’imaginaire anglais. Margaret Thatcher l’a exprimé un jour en disant: «Tous nos problèmes viennent d’Europe et toutes les solutions viennent d’Amérique»[5]. L’empire qui n’a pas couché le soleil sur ses terres ne célèbre pas le Jour de l’Indépendance car il n’a jamais été colonisé ou occupé,au contraire. Ses aventures coloniales se dirigeaient vers des continents lointains comme l’Afrique, l’Asie et l’Amérique. Par comparaison, la France a aussi connu des aventures coloniales, mais c’était surtout dans son voisinage immédiat, l’Afrique.
Dans la culture populaire anglaise, Hitler ne pouvait pas occuper la Grande-Bretagne, tandis que les autres pays européens étaient soit ses agents, occupés par lui, soit neutres.Alors que les Européens soutenaient l’unité pour surmonter la douleur du chauvinisme, du nazisme et de l’anti - sémitisme, les Britanniques n’ont pas ce sentiment.Ce «passé glorieux» est présent dans les produits culturels britanniques de toutes sortes. À la fin de la guerre mondiale, les Britanniques se considéraient comme les chefs d’un grand empire et le centre naturel de l’Europe, et qu’il était de leur responsabilité de diriger non seulement l’empire et le Commonwealth, mais aussi l’Europe. La plus grande cohésion avec le continent n’était pas un substitut à l’empire mais une opportunité d’étendre sa mission impériale. Churchill voulait conduire l’Europe vers l’union, mais avec l’effondrement de l’Empire britannique et la montée des deux grandes puissances soviétique et américaine puis le début de la formation de la «Communauté économique européenne», les Britanniques développèrent la théorie du scepticisme européen qui n’était pas séparée de la nostalgie impériale.
En 2010, le leader libéral-démocrate Nick Clegg a suggéré que la montée du Parti de l’indépendance et de l’aile eurosceptique du Parti conservateur était la réponse la plus claire à la perte de l’empire[6]. Pour les Européens, leur union était une victoire absolue de la paix sur la guerre et la tyrannie, et pour la Grande-Bretagne, c’était un aveu de sa propre faiblesse. Clegg affirme que l’hostilité continue de la Grande-Bretagne au projet d’Union européenne est étroitement liée à la nostalgie britannique pour l’époque de l’empire. D’ailleurs de nombreux théoriciens, politiciens et historiens lient l’idée de «Grande-Bretagne» au scepticisme européen et au nationalisme anglais étroit. Après la création de la CEE, les Britanniques ont vu que leur identité pouvait être à la fois européenne et impériale, mais cette vision a été confrontée aux défis du déclin de l’empire, aux allusions européennes selon lesquelles les Britanniques n’ont pas participé à l’établissement de l’Europe unie, et de la guerre froide qui a rapproché Londres plus que jamais de Washington[7].
Sur le plan politique, cet héritage de grandeur se traduit culturellement par une croyance profonde dans les valeurs nationales (législation, monarchie constitutionnelle et symbolique de la Reine, la monnaie nationale, etc.)qui peut difficilement cohabiter avec le transfert du processus de décision collective à Bruxelles dans davantage de dossiers[8]. Quant à la question des réfugiés et des immigrés, la tolérance traditionnelle à leur égard s’est transformée, il y a près d’un quart de siècle, en une peur croissante de l’«autre», qu’il soit originaire des anciennes colonies britanniques ou des pays européens, surtout après l’expansion de l’Union européenne en 2004 comportant désormais 26 pays[9].
2- Le rôle du quatrième pouvoir
Les médias britanniques, dominés par les tabloïds, ont joué un rôle majeur dans l’alimentation du scepticisme et de l’europhobie, puisque plus de 75 % des trente millions lecteurs de quotidiens y trouvent des raisons de douter de l’Union européenne. Psychologiquement du moins, il est difficile pour le citoyen moyen, à l’«anglaise», d’éprouver de l’affection pour cette union et de s’attribuer à l’identité européenne[10]. Les chaînes de télévision officielles, la BBC, les journaux comme le Financial Times ou The Economist et d’autres sont considérés par les Britanniques comme parmi les plus sérieux au monde. Et des tabloïds comme The Sun, le Daily Mail, le Sunday Times et d’autres sont lus quotidiennement par les trois quarts des Britanniques, et ils ciblent des pays continentaux comme la France et l’Allemagne ainsi que l’Union européenne. Le «magnat des médias» australo-américain Rupert Murdoch estime que «le grand journalisme attire toujours la décision. Les mots, les images et les déclarations qui sont les outils du journalisme doivent toujours être magistralement emballés»[11]. C’est ce que Murdoch a fait avec succès en Grande-Bretagne et a produit des effets clairs sur le lecteur moyen, comme le démontre une étude publiée par l’analyste Charles Gran sur l’impact des journaux populaires sur les opinions des citoyens à travers leur utilisation d’exagérations, de distorsions et d’analyses ciblées. Par exemple, cette presse a véhiculé, en 2004, l’idée que la nomination d’un ministre européen des Affaires étrangères conduirait la Grande-Bretagne à perdre son siège au Conseil de sécurité, et en 2007, le Sunday Express a promu le dicton selon lequel la formation d’une police européenne commune conduirait à la voir des patrouilles de police européennes dans les rues de Londres[12].
L’impact de cette presse ne s’arrête pas au grand public, mais s’étend aux politiques. Par exemple, l’une des raisons qui a poussé Tony Blair à ne pas organiser de référendum en 1997 sur l’adhésion de son pays à l’euro est la peur qu’il ne serait la cible d’attaques féroces de la part des tabloïds, qui remettraient en cause la légitimité de son gouvernement[13].
3-Les partis politiques britanniques
La question européenne n’a pas occupé une place importante dans la bataille électorale en Angleterre en 2010, car elle était quasiment absente des programmes électoraux des six partis concurrents, voire des partis pro-européens comme le Lib Dem (4 pages sur d’un programme électoral de 110 pages) ou les Verts (Une page sur cinquante) et les anti-européens d’extrême droite, comme le BNP (3 sur 100) et l’UKIP (4 sur 190), les deux principaux partis: travailliste (3/4 page sur 78) et conservateur (page et demie sur 110)[14]. Curieusement, les partis pro-européens, au lieu de se concentrer sur la coopération et les avantages économiques et autres, ont souligné qu’ils étaient contre un «État européen supranational» et contre l’euro et la militarisation de l’Europe, tandis que les partis populistes se sont concentrés sur les questions d’immigration, de délinquance, de lutte contre le chômage, d’identité et de souveraineté. Dans la littérature du British National Party (BNP), on trouve par exemple qu’il «aime l’Europe mais déteste l’Union européenne» et que cette dernière «est une organisation dont le but est de détruire la nation britannique et son identité. Les deux partis traditionnels travailliste et conservateur n’ont pas essayé de faire obstacle aux tentatives des médias de déformer l’image de l’Union européenne en soulignant ses mérites, autant qu’ils ont travaillé à élever des slogans ennuyeux tels que «L’Union fait la force».
4- L’opinion publique britannique
L’institut «Eurobaromètre», auquel la Commission européenne se tourne régulièrement, révèle que le Royaume-Uni est le pire élève de la classe d’opinion publique européenne. En comparant par exemple deux sondages d’opinion réalisés à l’automne 1999 et 2009 sur la question de savoir si l’appartenance à l’Union européenne était une «bonne chose», les Britanniques sont restés au bas de l’échelle tout au long de cette période. En 1999, seuls 29 % d’entre eux ont vu «quelque chose de bien» dans l’UE, contre une moyenne de 51 % dans l’ensemble de l’Europe (en Irlande, le chiffre était de 81 %). En 2009, le pourcentage de Britanniques n’était que de 30 %, contre une moyenne de 53 % (au Luxembourg, le pourcentage était de 79 %). 29 % des Britanniques étaient d’accord pour rester dans l’UE, en 1999, contre 42 % qui ne l’étaient pas. En 2009, les Britanniques restent au bas de l’échelle: 36%, contre une moyenne de 57% dans les 27 pays de l’UE[15].
Cette attitude négative envers l’Union est confirmée par les sondages Eurobaromètre et les sondages de nombreux autres instituts tels que Taxpayers Alliance (coalition des contribuables), YouGov et d’autres, sur l’attitude de l’opinion publique britannique envers les institutions européennes telles que le Parlement, la Commission, la Cour de justice et du Conseil. Cela signifie clairement qu’il existe un sentiment négatif généralisé dans les rangs de l’opinion publique anglaise envers l’Union européenne. Il est vrai que cette position a de nombreuses raisons, mais au premier plan se trouvent les informations obtenues par les citoyens dans la presse populaire à un moment où les responsables politiques et partisans hésitent à fournir des informations positives sur l’UE, peut-être parce qu’ils craignent de perdre un certain nombre d’électeurs qui sont sous l’influence de campagnes anti-UE. D’où la tentative du centre de brainstorming londonien Chatham House d’organiser en 2007-2008 un débat public national sous le titre «Cinquante ans d’Europe: ses conséquences politiques pour la Grande-Bretagne». Étonnamment, son rapport publié en octobre 2008[16], a rencontré des réactions sérieuses dans la presse de qualité, mais les journaux populaires largement diffusés l’ont traité avec mépris et négligence. Qui plus est, les partis politiques n’y ont pas fait référence dans leurs programmes et campagnes électorales en 2010.
II- Entre l’île et le continent: l’impossible union
L’histoire de l’engagement britannique en Europe depuis la fin de la guerre mondiale a oscillé entre résistance, révision, soumission et regret. Les gouvernements britanniques successifs n’ont pas hésité à tenir tête aux projets d’intégration européenne (politique étrangère, de défense, sociale et agricole commune, monnaie unique, Schengen, etc.) dans lesquels ils trouvaient une contradiction avec leur conception de souveraineté nationale, et de soutenir ce qu’ils considéraient comme compatible avec les valeurs et intérêts nationaux tels que le marché commun et la libéralisation des marchés. La relation anglo-européenne était pleine de paradoxes.
1- La Grande-Bretagne dans la Communauté économique européenne
A Zurich le 19 septembre 1946, alors que l’Europe sortait d’une violente guerre mondiale et que les traits de la guerre froide commençaient à se dessiner, le Premier ministre britannique Winston Churchill appela, à la formation d’un «États-Unis d’Europe»[17]. Le 7 mai 1948, il s’exprima devant la Première Conférence de l’Europe: «Ce n’est pas le mouvement des partis, mais le mouvement des peuples»[18]. Mais l’ironie est que Churchill, connu pour son soutien à l’unité européenne, n’y a pas inclus son pays, mais a considéré qu’il se situe à l’intersection de trois cercles: le Commonwealth[19], l’Atlantique et l’Europe, et qu’il pourrait être un «parrain» d’une telle union, qui devrait être sous la responsabilité conjointe de la France et de l’Allemagne.
Le 9 mai 1950, le Premier ministre français Robert Schumann pose les premières bases de la construction européenne, conjointement avec le chancelier allemand Konrad Adenauer, en présentant un projet de création d’une communauté européenne de charbon et de l’acier visant à «rendre la guerre pratiquement impossible entre les puissances européennes,» que le Premier ministre travailliste britannique Clement Attlee refuse le 3 juin de rejoindre. La Grande-Bretagne est l’un des plus grands producteurs de charbon et d’acier au monde, les travaillistes, ainsi que l’opposition dirigée par Churchill, craignaient que la liberté de décision et d’action en la matière ne soit transférée à une entité supranationale[20].
Les négociations entre six pays européens: Allemagne, France, Italie, Luxembourg, Belgique et Pays-Bas ont abouti à la création de la Communauté européenne du charbon et de l’acier dans le cadre de l’accord de Paris en 1951 puis à la signature de l’accord de Rome qui a établi la Communauté économique européenne en 1957. Bien entendu, Londres gouverné par les conservateurs entre 1951 et 1964, n’a adhéré à aucun de ces traités considérés comme un concurrent potentiel sérieux. Dès lors, elle se rapproche des pays scandinaves, de la Suisse, du Portugal et de l’Autriche pour former en 1960 la «Communauté européenne de libre-échange» (AELE), alternative apolitique et plus souple à la CEE, à une époque où ses relations avec les pays du Commonwealth éprouvaient des difficultés sur fond de décolonisation dans les années soixante.
Le projet AFTA[21] n’a pas rencontré le succès espéré à un moment où de nombreux pays ont commencé à exprimer leur désir d’adhérer à la CEE, qui a fixé les conditions et les critères d’une telle adhésion. Londres a trouvé inévitable de se joindre à cette marée, mais ses tentatives d’adhésion( comme celle,en 1963,du gouvernement conservateur d’Harold Macmillan ou celle du Premier ministre travailliste Harold Wilson en 1967 ) ont été rejetées par le présixdent français Charles de Gaulle, qui a estimé que la Grande-Bretagne était trop liée aux États-Unis et que son adhésion au groupe économique entraverait son développement[22].
La troisième tentative en 1973 a été couronnée de succès parce que de Gaulle avait déjà quitté le pouvoir en 1969 pour être remplacé par Georges Pompidou qui entretenait une relation privilégiée avec le premier ministre britannique Edward Heath.Le 5 juin 1975, un référendum populaire est organisé en Grande-Bretagne, dont le résultat est de 67% en faveur de l’ adhésion `a la CEE[23].
En 1979, Margaret Thatcher, qui venait d’être élue Premier ministre, entame une longue querelle avec la CEE, à propos de sa demande de réduire la contribution financière de son pays au budget de la Communauté sous le slogan «Je veux récupérer mon argent», un différend qui durera jusqu’en 1984 et que «la dame de fer» l’emportera. La Communauté européenne a finalement accepté de réduire la contribution financière britannique, et de restituer 66 % de cette contribution[24]. En 1979, Thatcher refuse d’adhérer au «Système monétaire européen», conçu pour contrer l’instabilité monétaire[25]. En 1985, Londres n’a pas signé les accords de Schengen, et cette non-adhésion sera par la suite inscrite dans le traité d’Amsterdam en 1997, qui reconnaîtra à Londres le droit aux exceptions qu’elle a obtenues dans le traité de Maastricht en 1992, notamment en restant en dehors de la monnaie unique et de Schengen. Ce qui a contraint l’Irlande à rester dehors, malgré sa volonté d’adhérer, car la République d’Irlande et la Grande-Bretagne sont liées à une zone frontalière commune (Common Travel Area) depuis 1923, et l’adhésion de l’Irlande à Schengen aurait pratiquement aboli ces frontières, qui d’ailleurs constituera plus tard l’un des obstacles les plus importants dans les négociations du Brexit.
Dans la ville belge de Bruges en 1988, Margaret Thatcher,pour qui l’Europe n’est qu’un marché commun et ne doit aller dans aucune direction d’intégration monétaire, fédérale ou politique,réitère son opposition à la mise en place d’une Europe fédérale et son rejet d’une monnaie commune ; sa monnaie étant la livre sterling qui n’est pas liée aux mécanismes de change en vigueur entre les monnaies européennes[26].
A cette époque, la bipolarité était sur le déclin, à la veille de la chute du mur de Berlin et de la fin de la guerre froide. Les Européens, à l’initiative du président français François Mitterrand et le soutien du président américain George Bush père, n’ont pas tardé à discuter du développement de la communauté économique en une union. Le chancelier allemand Helmut Kohl a accepté d’abandonner le mark allemand au profit du projet d’Union européenne en échange d’un soutien euro-américain et spécifiquement français à la réunification allemande. Les négociations ont abouti à la signature de l’Accord de Maastricht, qui a établi l’Union européenne le 7 février 1991, à partir de douze pays qui constituaient la CEE. Mais la Grande-Bretagne a posé des conditions qui consistaient en plusieurs exceptions (la monnaie unique, Schengen, la politique agricole commune, la question sociale, etc.) en échange de l’adhésion au traité de Maastricht, et les Européens ont accepté.
2- La Grande-Bretagne dans l’Union européenne
En 1990 Thatcher sort du pouvoir au profit de John Major qui accepte de signer le traité de Maastricht. Les conservateurs au pouvoir entre 1979 et 1997 se divisent profondément sur le projet européen. Major obtient en 1991 un article du traité permettant à son pays de s’en retirer afin d’éviter d’entrer dans la monnaie unique et le «pacte social», en échange de la conclusion du traité, mais il fait néanmoins face à une tempête de critiques de la part des «sceptiques» qui exigent l’organisation d’un référendum qu’il rejetait par crainte d’un résultat négatif. Il résiste aux sceptiques, avant d’être finalement contraint de démissionner, pour être remplacé par le travailliste Tony Blair en 1997.
Blair pratiquait une politique plutôt favorable à l’UE[27], mais la participation de Londres à la guerre en Irak,en 2003, sur fond de profonde division européenne, puis le rejet des peuples français et néerlandais lors du référendum en 2004 du projet de Constitution européenne commune, ainsi que la montée du populisme anti-européen en Grande-Bretagne, ont entravé un rapprochement éventuel entre Londres et l’UE.
Le retour des conservateurs au pouvoir et l’arrivée de David Cameron au 10 Downing Street en 2010 ont mis un terme à la période d’accalmie relative dans les relations avec Bruxelles. L’eurosceptique Cameron, comme la plupart des conservateurs, avait rejeté le traité de Lisbonne que son prédécesseur Gordon Brown soutenait en 2008. En 2011, la Grande-Bretagne était le seul pays de l’UE à vingt-sept qui rejette l’accord européen sur la discipline de trésorerie (réduction du déficit des budgets des pays de l’Union) et impose l’exemption de son pays de certaines législations européennes.En 2013 elle a menacé d’opposer son veto au budget de l’Union pour les années 2014-2020 et a exigé une réduction spectaculaire de celui-ci.[28] Le 23 janvier 2013, Cameron a dû faire face à une campagne d’eurosceptiques au sein de son parti et du populiste UK Independence Party (UKIP), l’obligeant à promettre un référendum demandant: Pensez-vous que le Royaume-Uni devrait rester membre de l’Union européenne? Cette promesse n’était qu’une manœuvre électorale visant à assurer sa réélection en 2015.
Pendant cinq ans, Cameron a réussi à obtenir beaucoup d’exemptions des Européens au profit de son pays afin de convaincre son parti de ne pas organiser le référendum, mais malgré sa victoire écrasante aux élections de 2015, il a finalement succombé aux pressions des sceptiques, et annoncé que ce référendum aura lieu et qu’il votera en faveur du maintien dans l’UE. Ceci après avoir convaincu les Européens qu’il ferait avorter le projet des sceptiques et que le résultat du référendum serait contre le Brexit[29]. Qui plus est, il a promis de démissionner si le résultat était pour le Brexit, et c’est ce qui arrivera.
III- Sortie de l’Union: causes déclarées et conséquences possibles
Le 23 juin 2016, le résultat du référendum était de 51,9% en faveur du Brexit. Ce qui a constitué un séisme politique et le début d’une nouvelle étape historique en Europe et en Grande-Bretagne, avec ses conséquences sur les relations internationales. Comme promis Cameron a remis sa démission. En vertu de l’article 50 du traité de Lisbonne, Londres doit entamer des négociations avec Bruxelles sur le Brexit, qui deviendra une réalité début 2019, notamment afin d’organiser la future relation au-delà de cette date. Les négociations ont pratiquement commencé le 29 mars 2017 afin de parvenir à deux accords: l’accord de divorce, qui sera conclu par le Parlement britannique le 9 janvier 2020, et l’accord sur les relations post-Brexit, qui entreront en vigueur au début de l’année 2021. Quelles sont les raisons déclarées du Brexit, et quelles sont ses éventuelles conséquences sur les relations euro- britanniques?
1- Les raisons déclarées
Ces raisons peuvent se résumer en cinq: La première est le problème des déplacés et des immigrés, dont la moitié étant originaires de l’Europe, notamment des anciens pays de l’Est (Pologne, Roumanie, pays baltes...), sans parler de ceux du Moyen-Orient depuis le début du soi-disant «printemps arabe». Le principe européen de libre circulation empêche Londres de prendre des mesures pour arrêter ce flux. Les «Brexitiens» estiment que la sortie de l’UE leur permet de résoudre ce problème de manière radicale selon l’intérêt britannique et non sur la base de décisions européennes[30].
La deuxième raison est la question de la souveraineté nationale.L’idée que leur pays est la «mère des parlements» et «la plus ancienne démocratie» est ancrée dans l’imaginaire populaire anglais qui ne peut supporter l’idée que 70 % des textes juridiques applicables viennent de Bruxelles, notamment la commission non élue[31].
La troisième raison est la volonté britannique de sortir d’un bateau qui coule.La crise de l’euro est récurrente, et des milliards d’euros ont été offerts à des pays européens en difficulté financière, comme la Grèce par exemple (ici la Grande-Bretagne a refusé de contribuer). C’est un projet raté et complexe qui doit être abandonné[32].
La quatrième raison est que si les grandes entreprises multinationales préfèrent rester dans l’union, les patrons des petites et moyennes entreprises se plaignent des normes et réglementations que Bruxelles leur impose. Les agriculteurs critiquent la PAC et les pêcheurs sont frustrés par les restrictions de Bruxelles. Et la directive de ce dernier concernant le temps de travail (48 heures par semaine) est critiquée par beaucoup, et la «City» se plaint des normes financières européennes et des restrictions imposées aux bonus des banquiers. Sans compter que le Brexit permettra d’économiser 11 milliards de livres, soit la contribution de Londres au budget de l’Union.
La dernière raison est la conviction que le continent européen est petit par rapport au marché mondial. Londres, après avoir regagné son siège à l’Organisation mondiale du commerce, peut signer ses propres partenariats avec des pays comme la Chine, le Japon, l’Inde, l’Amérique latine et d’autres, et revenir à des relations privilégiées avec les pays du Commonwealth. Et n’oublions pas que le président Trump a promis aux Britanniques d’énormes contrats commerciaux s’ils quittaient l’Union européenne[33].
Ces raisons présentées par les partis et les personnalités pro- Brexit, ne sont que des perceptions sans preuves et pourraient être déçues par la réalité. Qu’il suffise de dire que de nombreuses entreprises, banques et investissements se sont précipités pour quitter Londres lors du Brexit vers Paris, Francfort, Dublin et autres, et que la livre sterling a beaucoup baissé, tout comme les prix de l’immobilier et autres.
2- Conséquences possibles
Il est très difficile de déterminer les conséquences futures du Brexit, et les deux parties doivent désormais trouver un point d’équilibre entre coopération et compétition. Mais sur la base de l’expérience historique, il est possible d’anticiper les caractéristiques de ce que sera la Grande-Bretagne en dehors de l’Union européenne et les relations entre elles.
Il ne fait aucun doute que l’UE, avec la sortie de la G-B, perd 66 millions de citoyens avec leur contribution de 15% du PIB européen, faisant «du Royaume-Uni un concurrent à nos portes», selon ledit de la chancelière Angela Merkel[34]. Sur le plan géopolitique, l’Union perd un pays doté de l’arme nucléaire, un siège permanent au Conseil de sécurité de l’ONU et la possibilité d’envoyer des forces militaires à l’étranger (Falklands, Argentine en 1982, par exemple). Et le Brexit est un indice de la dissolution de l’Union, notamment après les crises de l’euro et de l’immigration et la faiblesse de la coopération européenne face à la pandémie de Covid19. Depuis Margaret Thatcher qui a déclaré le 30/11/1979 «Je veux mon argent» jusqu’à Cameron, en passant par Blair, Londres a poussé l’union dans le sens du marché et de l’élargissement avec les moyens d’un pouvoir limité. Les Européens accusent Londres d’avoir fait du marché commun la pierre angulaire de la construction européenne, et d’avoir toujours voulu élargir l’union pour la dissoudre et éviter l’intégration, et cela a toujours été face à la France qui veut plus d’intégration et de défense commune et politique étrangère.Ces Européens sont partagés quant à l’avenir.Il y a ceux qui y croient vraiment et trouvent dans le Brexit une opportunité de reconstruire le projet européen sans les entraves britanniques, comme il y a ceux qui craignent la faiblesse persistante du club européen, qui se cherche une identité et ne sait plus quel rôle il veut jouer dans le monde, comme l’a dit le haut représentant pour la politique étrangère européenne Josep Borel lors de sa visite à New Delhi le 16-1-2020[35].
Depuis l’engagement de la Grande-Bretagne en Europe en 1973, les Britanniques ont été les obstacles permanents au processus d’unité, et donc leur sortie lève un frein majeur à ce processus. L’union n’avait certainement pas le même sens pour Londres, Paris ou l’Allemagne. Londres l’a affaibli en restant en dehors de Schengen et de l’euro et ses demandes constantes d’exceptions et d’exemptions en matière sociale, judiciaire et interne.
Ainsi, après le Brexit, une union monétaire plus forte pourrait émerger, car la zone euro se retrouvera,au moins mécaniquement, plus forte: elle représentera 85 % du PIB européen, un chiffre qui augmentera après l’entrée de la Croatie et de la Bulgarie dans un futur proche, contre 72% avant le Brexit, ce qui signifie que l’euro sera le moteur de l’Europe, comme le prédit Enrico Lina, directeur du «Delors Institute» et ancien Premier ministre italien[36].
Boris Johnson a promis à ses citoyens un nouvel âge d’or après le Brexit, mais sans stratégie clairement annoncée ni même un programme présentant une vision future pour le pays, et les quatre années de négociations n’ont pas vu un débat public sérieux sur le rôle et la place de la Grande-Bretagne dans le monde après le Brexit. Theresa May a insisté sur le concept de «Global Britain»[37] sans préciser ce qu’il signifie, quelles sont ses ambitions et les moyens physiques pour y parvenir. Johnson a promis de lancer une campagne internationale sous le slogan «Ready to Trade» après que nous nous soyons «libérés des fardeaux de l’Union douanière européenne». Mais la Grande-Bretagne perdra les bénéfices de plus de quarante accords commerciaux signés par l’UE avec le monde (Inde, Japon, Canada, Singapour, Vietnam, etc.). Le président Trump avait promis aux Britanniques de signer avec eux d’énormes accords commerciaux, mais il est parti avec cette promesse.
Concernant le danger pour la situation financière de Londres, dont beaucoup ont mis en garde, les partisans de Johnson croient que la «City» continue de prospérer, et aujourd’hui elle compte 400 000 salariés et constitue 10 % du PIB britannique, et ils pensent que les choses ne vont pas changer, car c’est l’un des meilleurs centres financiers au monde, peut-être le meilleur[38].
Côté militaire, le secrétaire britannique à la Défense Ben Wallace a déclaré: «Nous ne pouvons pas compter sur les États-Unis. Boris Johnson avait annoncé fin décembre 2019 une “revue stratégique des dépenses militaires tout en cherchant à moderniser la défense nationale et à réduire les coûts sur le long terme”[39], au moment où les chefs d’état-major réclamaient un milliard de livres sterling supplémentaire pour combler le déficit du budget de la défense pour l’année 2020. Bien que la coopération militaire franco-britannique continuera d’exister dans le cadre du traité bilatéral signé en 2010, avoir un parapluie européen complet est quelque chose d’utile stratégiquement que la Grande-Bretagne a perdu. Cela a incité le Premier ministre irlandais Leo Varadkar à déclarer que «le Royaume-Uni doit reconnaître qu’il ne sera qu’un petit pays après le Brexit»[40]. Comme lui, il y a ceux qui craignent que la Grande-Bretagne ne devienne une petite puissance et un État isolationniste.
Plus dangereux encore, le Royaume-Uni ne sera peut-être plus «uni», surtout après que l’Écosse cherche à faire sécession. La Première ministre écossaise Nicola Sturgeon a déclaré qu’»il est temps pour nous de devenir une nation européenne indépendante. Le Brexit s’est produit contre la volonté du peuple écossais, qui a voté à 62 % contre»[41]. Johnson refuse d’organiser un référendum en Écosse sur la volonté de rester au Royaume-Uni après le Brexit, car il craint que le résultat ne favorise la sortie. Un tel référendum a eu lieu en 2014, dont le résultat était en faveur de l’union, mais les circonstances ont changé à cause du Brexit. Il convient également de noter que l’Irlande du Nord a également voté contre le Brexit lors du référendum de 2016.
Concernant les relations futures entre la Grande-Bretagne et l’Union européenne, outre les attentes pessimistes d’une baisse des échanges commerciaux de dizaines de milliards d’euros, on peut dire que quelques semaines après la signature de l’accord et l’annonce de Johnson que «nous serons le meilleur ami et allié de l’Union», les divergences ont commencé à émerger. Le 3-3-2021, son gouvernement a pris la décision unilatérale de reporter l’introduction du contrôle alimentaire avec l’Irlande du Nord pour une période de six mois. L’UE a vu dans cette décision une «violation flagrante» de l’accord sur le Brexit et a menacé de recourir aux tribunaux européens. Il y a eu des accusations mutuelles entre les deux parties de violation de cet accord.
À son tour, la pandémie de Corona a révélé l’étendue de l’absence de coopération et de coordination. l’UE a accusé Londres de ne pas y exporter suffisamment le vaccin AstraZeneca qu’elle avait inventé. En effet, AstraZeneca a annoncé le 22 janvier 2021 que ses exportations de ce vaccin vers l’Union européenne seraient inférieures de 60 % à ce qui avait été convenu, avant que le directeur de l’entreprise n’annonce que la priorité serait pour la Grande-Bretagne avant les Européens. La «guerre des vaccins s’est terminée par un cessez-le-feu», selon une expression éditoriale du Monde du 30/01/2021.
La question de la frontière irlandaise, le problème des vaccins et la baisse des exportations britanniques vers l’Union, ainsi que les promesses du négociateur européen en chef, Michel Barnier, aux pêcheurs européens qu’il les défendra «jusqu’au dernier souffle» face à Londres, et de l’autre côté les promesses des responsables anglais de défendre leurs pêcheurs, tout indique que la relation anglo-européenne après le Brexit, ne sera pas comme l’a promis Boris Johnson[42].
Conclusion
Depuis que Churchill a dit à de Gaulle, en 1944, que si la Grande-Bretagne devait choisir un jour entre le continent et le large (c-a-d. l’Atlantique et plus précisément les États-Unis), elle choisirait ce dernier, jusqu’à la visite du président Trump à son allié Johnson à Londres en 2019, où l’exhortant à poursuivre sa sortie de l’UE et lui promettant de grands accords commerciaux, en passant par l’alliance étroite entre Thatcher et Reagan ou Blair et Clinton, Londres est resté l’un des alliés les plus proches de Washington dans le monde, et sa relation avec lui est restée une priorité dans ses relations internationales, même avec l’UE dans laquelle il a joué un rôle de perturbateur. Mais cette relation est en fait plus proche d’une dépendance que d’une alliance. C’est Londres qui sous-tend les décisions américaines, et non l’inverse. Blair, par exemple, a envoyé une armée en Irak en 2003, en application d’une décision prise par le président américain Bush Jr. malgré l’impopularité de cette décision à Londres et son manque de légitimité européenne. Avant cela, c’est le négociateur américain, George Mitchell, qui a conclu en 1998 les accords de Stormont qui ont mis fin à la guerre civile irlandaise que Londres avait subie pendant trente ans sans pouvoir y trouver de solution. Cette relation de dépendance contraste avec la «Grande-Bretagne globale» et les sentiments dominants de fierté, de dignité, de souveraineté, etc., qui étaient les motifs de la relation trouble avec l’Europe. Au lendemain de la signature de l’accord de sortie, Johnson a crié «Nous avons restauré notre souveraineté, notre indépendance et notre liberté de décision...» sans souligner les intérêts commerciaux, économiques, sécuritaires, militaires, politiques et stratégiques de cette sortie.
La question de l’identité explique la relation avec les États-Unis, que les Britanniques considèrent comme sortis du sein de leur grand empire, auxquels la langue anglaise a été transmise, devenue aujourd’hui mondiale, ainsi que de nombreuses coutumes, traditions, bipartisme, démocratie et droits de l’homme etc. Cette question et les revendications de différenciation qui l’entourent fournissent une explication aux inquiétudes et aux hésitations qui prévalaient dans les relations britanniques avec l’Europe il y a trois quarts de siècle, et que le «Quatrième Pouvoir» et certains partis populistes avec une partie de la classe politique ont réussi à pousser le pays vers la porte de sortie de l’Europe, par un travail systématique et organisé tout au long de cette période.
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- Lisa O’Carroll “Threat of no-deal Brexit remains”,the Guardian,March19,2021
[1]- Le terme Brexit signifie la sortie de la Grande-Bretagne de l’Union européenne.
[2]- Kal J.holsti “National Role Conceptions in the Study of Foreign Policy”,International Studies Quarterly,Vol.14,N3,Sep.1970,pp.233-309.
[3]- Steven J.Campball,”Role Theory,Foreign Policy Advisors,and U.S. Foreign Policy Making”,USA:department in International Studies of Southern California,International Studies Association,Februaru 1999,p.1
[4]- https://e3arabi.com/
[5]- A. Forster, Euroscepticism in Contemporary British Politics: Opposition to Europe in the Conservative and Labour Parties since 1945, Londres, Routledge, 2002.
[6]- Benjamin Grob-Fitzibbon “Continental Drift,Britain and Europe from the Empire to the Rise of Euroscepticism”,Cambridge University Press,May 2016, p.48.
[7]- Ibid.
[8]- Ch. Gifford, «The UK and the European Union: Dimensions of Sovereignty and the Problem of Eurosceptic Britishness», Parliamentary Affairs, vol. 63, n 2, 2010 ; V.A. Schmidt, «Adapting to Europe: is it harder for Britain?», British Journal of Politics and International Relations, vol. 8, 2006.
[9]- A. Geddes, Immigration and European Integration: Towards Fortress Europe, Manchester University Press, 2008 (2nde edition) ; P. Panavi, An Immigration History of Britain: Multicultural Racism since 1800, London.2009.
[10]- R. Kuhn, Politics and the Media in Britain, London, Palgrave, 2007 ; Ch. Grant, Why is Britain eurosceptic?, London, Center for European Reform,Dec.2008.
[11]- www.aljazeera.net/midan/miscellaneous/2017/11/22
[12]- Charles Grand,” Exclusive! The British Press is different”,http://ec.europa.eu/public_opinion/archives/eb/eb71/eb71_htm>
[13]- Ibid.
[14]- Liberal Democrat Manifesto 2010 – Change that Works for You, Building a Fairer Britain, <network.libdems.org.uk/manifesto2010/libdem_ manifesto_2010.pdf > ; Green Party, Green Party Manifesto General Elections – Fair is Worth Fighting for, in Greenparty.org.uk ; United Kingdom Independence Party, UKIP Manifesto – Empower-ing the People, in Ukip.org ; British national Party, BNP Manifesto 2010: British National Party Key Pledges, in <www.general-election-2010.co.uk/2010-general-election-manifestos/BNP-Manifesto-2010.pdf > ; Labour Party, The Labour Party Manifesto 2010 – A Future Fair for All, in Labour.org.uk ; et Conservative Party, Invitation to Join the Government of Britain – Manifesto 2010, in Conservatives.com
[15]- Eurobarometre,n71,sept 2009,<http://ec.europa.eu/public_opinion/archives/eb/eb71/eb71_fr.htm>
[16]- Chatham House Commission Report, A British Agenda for Europe - Designing our Own Future, The Chatham House Commission Report on Europe after Fifty: Policy Implications for Britain, London, Royal Institute of International Affairs, 2008, in Chathamhouse.org.uk.
[17]- Discours de Churchill devant l’Université de Zurich, https:///rm.coe.int/16806981f3.
[18]- Benjamin Grob-Fitzibbon,”Continental drift”,Op.Cit.p.430.
[19]- Le Commonwealth est une organisation qui comporte 53 Etats dont la plupart sont d’anciennes colonies britanniques.
[20]- http://www.cvce.eu/en/recherche/unit/content/-unit/5cc6b004-33b7-4e44-b6db-f5f9e6c01023/
[22]- The Times»toward a European Britain»,July8,1971,The Guardian»Britain and Europe :The Choice That Governs our Future», July 8,1971 et www.letempsarchives.ch/page/JDG_1967_11_21/1/second veto de gaulle
[23]- Ainsi, le nombre des membres de la CEE est passé à neuf avec l’adhésion du Danemark et de l’Irlande simultanément à la Grande-Bretagne.
[24]- www.vie-publique.fr/eclairage/19375-46ans-derelations-entre-lunion-europeenne-et-le-royaume-uni
[25]- Ibid.
[26]- Ibid.
[27]- Son ministre des A.E. Robin Cock affirme, dans une interview avec le quotidien français Le Monde le 26/4/2004 que son pays pourrait rejoindre la monnaie unique l’euro à long terme.
[28]- www.letemps.ch/monde/budget-europeen-quete-dun-compromis
[29]- www.letemps.ch/opinions/coup-maitre-david-cameron-lechiquier-europeen
[30]- https://www.lefigaro.fr/international/2016/02/17/01003-20160217ARTFIG00214-brexit-cinq-raisons-pour-lesquelles-les-britanniques-veulent-nous-quitter.php
[31]- Ibid.
[32]- Ibid.
[33]- Ibid.
[34]- www.lemonde.fr(27-1-2020)
[35]- Ibid.
[36]- Ibid.
[37]- Le Monde 28/1/2020.
[38]- Francois Lenglet,RTL,24/2/2016.
[39]- Sunday Times,15/1/2020.
[40]- BBC,25/1/2020.
[41]- TheGuardian,24/12/2020.
[42]- Lisa O’Carroll,”Threat of no-deal Brexit remains”, The Guardian,March19,2021.
دوافع انفصال بريطانيا عن الاتحاد الأوروبي
د. غسان العزي
بعد حروب طويلة مدمرة عصفت بالقارة الأوروبية وآخرها الحرب العالمية الثانية، قررت دول أوروبية طي صفحة الصراعات والحروب، فأنشأت في ما بينها تكتلًا اقتصاديًا تحت مسمى "المجموعة الاقتصادية الأوروبية" عبر معاهدة روما للعام ١٩٥٧. ثم أخذت هذه المجموعة بالتطور لتضم اثنتَي عشرة دولة وقّعت معاهدة الاتحاد الأوروبي في ماستريخت في العام ١٩٩١،وهو اتحاد راح بدوره يتطور ويحقق إنجازات عن طريق الاندماج الاقتصادي ليصل عدد دوله إلى ٢٨ دولة.
خلال مسيرته الطويلة كانت بريطانيا تقف في وجه كل المحاولات الاندماجية السياسية والدفاعية التي تتخطى السوق المشترك. لم تدخل لندن في منطقتَي شنغن ولا اليورو (العملة الموحدة) وكانت تطالب على الدوام باستثنائها من معاهدات ذات طابع مالي واجتماعي وتحصل على ما تريد. رغم ذلك فإن النزعة الانفصالية عن الاتحاد بقيت موجودة لدى قسم كبير من الرأي العام والإنتلجنسيا ولا سيما في صفوف الأحزاب اليمينية المتطرفة التي نجحت أخيرًا في فرض استفتاء شعبي على رئيس الوزراء المحافظ كاميرون والذي جاءت نتيجته في العام ٢٠١٦ لمصلحة البريكست أي خروج بريطانيا من الاتحاد الأوروبي.
يحلل هذا البحث الخلفيات العميقة والأسباب المباشرة للبريكست، وهي خلفيات تاريخية ذات علاقة بالماضي الأمبراطوري البريطاني وبجغرافية الجزيرة التي تفصلها المياه عن القارة، وأخرى متعلقة بشعور الرأي العام بالتميز عن الأوروبيين ودور الصحافة الشعبية في تنمية هذا الشعور وتعزيزه قبل أن تتدخل مشكلات اقتصادية وأمنية وأخرى مع تدفّق المهاجرين والنازحين من سوريا وأفغانستان والعراق وأفريقيا وغيرها والتي وقف البريطانيون ضد قواعد المفوضية الأوروبية التي تفرض عليهم كوتا أو نسبة لاستقبال عدد من هؤلاء.
رغم أن رئيس الوزراء البريطاني بوريس جونسون اعتبر أن البريكست حرر بلاده من إملاءات بروكسل إلا أن التوقعات تشي بخسائر كبيرة سوف تصيب بريطانيا والاتحاد في آن معًا في عصر تنزع فيه الدول إلى التكتل والتحالف لمواجهة أعاصير العولمة والأقلمة.