Contribution à l’élaboration du nouveau droit de la mer

Contribution à l’élaboration du nouveau droit de la mer
Préparé par: Laurice Rizkallah
Diplômée de l’I.H.E.I. (Paris II). Dr. en Droit. Professeur à l’U.L.

Introduction

Sous la flèche du temps et l’irruption de l’histoire, le droit de la mer a connu des transformations longtemps imperceptibles, sensiblement accélérées depuis plus d’un quart de siècle. Si  l’usage et la coutume ont toujours été à l’origine du droit de la mer, les années soixante dix - avec la découverte des fonds marins (source féérique de ressources minérales) leur proclamation dans une résolution de l’Assemblée Générale des Nations Unies en 1970, patrimoine commun de l’humanité et l’instauration d’un mécanisme international destiné à leur gestion - le droit de la mer est entré dans l’ère de l’institutionnalisation fondée sur ces nouveaux instruments concertés non- conventionnels : les résolutions.

Avant d’aborder cette pseudo-source du droit de la mer qui a suscité, comme nous le verrons, beaucoup de controverse (II), et pour que notre exposé soit plus compréhensif, nous nous arrêterons d’abord aux points saillants qui ont marqué le droit de la mer depuis ses origines jusqu’à nos jours (I).

 

I-  Perspective historique du droit de la mer

A-  Les origines

“Pendant longtemps le droit de la mer est apparu comme l’un des domaines les plus stables du droit international”([1]). Il reposait jusqu’à ces dernières décennies sur des principes simples et fort anciens; les techniques d’utilisation du milieu marin et d’exploitation de ses ressources n’avaient guère subi de changements profonds; ceux qui tiraient les principaux profits de la mer étaient les Grandes Puissances Maritimes - une poignée d’Etats dotés de flottes importantes.

Relevant par tradition du droit coutumier([2]), ce sont les notions “res communis” ou “res nullius” qui s’y imposaient afin de permettre la différenciation entre le statut juridique de la mer et de la terre. On peut dire que le droit de la mer n’a atteint un caractère international qu’au cours du 17ème siècle à la faveur de la querelle historique opposant Grotius à Selden([3]). Cette époque fut considérée comme le véritable début du droit international de la mer classique fondé sur le concept de liberté.

Ce mouvement en faveur de la liberté des mers s’est amplifié au cours des siècles suivants sous la pression des nécessités économiques et politiques suscitées par le grand mouvement de colonisation des 18e et 19e siècles. Dès le début du 19e siècle le principe est fermement établi et il forme la base sur laquelle va se développer le droit classique de la mer. Il avait, certes, été admis depuis fort longtemps qu’une étroite bande de mer proche des côtes était soumise à la souveraineté des Etats, et cette souveraineté sur une  mer territoriale n’avait jamais été réellement mise en cause malgré les divergences d’opinions sur sa nature et son étendue. Depuis qu’il a été affirmé en 1703 puis en 1737 que le pouvoir de l’Etat finit là où finit la force des armes, d’où l’on a déduit que l’étendue de la mer territoriale pouvait être déterminée par la portée du canon, cette approche n’est nullement contestée([4]).Le principe de la souveraineté de l’Etat côtier sur une mer territoriale étant accepté, c’est autour de la liberté de la haute mer que se sont développées les règles de droit.

 

B- Les Conférences des Nations Unies sur le droit de la mer

a- Les premières Conférences mondiales à caractère général ou spécifique sur le droit de la mer ne datent que du 20ème siècle([5]). Elles se sont heurtées, d’emblée, aux intérêts particuliers des différents Etats. L’échec de la première Conférence tendant à codifier les règles  relatives à la mer territoriale tenue à la Haye en 1930, illustre parfaitement les difficultés à surmonter([6]). Après la seconde guerre mondiale, sous l’égide de  l’O.N.U.  et  avec   la création  d’un  organisme  spécialisé   permanent

composé de juristes provenant de  différents systèmes juridiques (la Commission du Droit International : C.D.I.), l’entreprise de codification se transforme : “jusqu’alors  éparpillée “elle devient rationnelle et systématique”([7]). Aussi, dès 1949, le droit de la mer est inscrit à son ordre du jour. L’approche partielle à l’origine (régime de la haute mer), fut ensuite élargie pour finalement embrasser l’ensemble du droit de la mer([8]).

b- La Conférence des Nations Unies à Genève en 1958 devait adopter, à partir des propositions de la Commission du droit international, quatre conventions relatives aux questions les plus controversées à l’époque (Convention sur la mer territoriale et la zone contiguë; Convention sur la haute mer; Convention sur la pêche et les ressources biologiques de la haute mer; Convention sur le plateau continental). On aurait pu penser qu’elles constitueraient un nouveau droit de la mer. Puisque par - delà la codification du droit international avait été réalisé, pour certains problèmes, un “développement progressif”([9]). Or, il n’en a rien été et une nouvelle transformation devait apparaître. Son exigence surgit à partir de 1967, c’est - à- dire depuis qu’a été  développée l’idée que le fond des mers et des océans est tapissé de ressources minérales particulières et fort abondantes.

Deux séries de raisons expliquent ce mouvement transformationnel du droit de la mer. La première réside dans les Conventions de Genève. Elaborées en 1958 - à une époque où ne faisaient pas encore partie de l’O.N.U. les Etats issus de la décolonisation - les quatres Conventions ne liaient qu’un petit nombre d’Etats (les quelques Puissances Maritimes de l’époque). Qui plus est, les nouveaux Etats considéraient le droit de la mer classique et les Conventions de Genève comme constituant un système juridique à la construction duquel ils n’ont pas participé et donc, ne pouvant leur être opposable.

Dès lors, en raison des faiblesses des Conventions de Genève de 1958 illustrées par la lenteur des ratifications et, à la suite de la deuxième Conférence de 1960, le droit classique semblait insuffisant à combler les lacunes juridiques et répondre aux besoins nouveaux de la seconde moitié du XXe siècle. Il a fallu attendre l’initiative de l’Ambassadeur Pardo([10]) génératrice de l’institutionnalisation du droit de la mer pour que la question de codification de ce droit fût remise à l’ordre du jour. Nous en venons, ici, à la deuxième raison constitutive du mouvement transformationnel.

La seconde raison tient, en effet, à la prise en considération des utilisations de la mer. Jusqu’ici le droit de la mer ne connaissait que des activités de surface ou menées à partir de celle-ci : c’est un droit unidimensionnel. La mer est une voie de passage. C’est surtout sous l’angle de la navigation et du mouvement qu’elle a été étudiée par les géopolitologues. Les ressources exploitées étaient essentiellement celles de la pêche, elle-même accessoire de la navigation. Les sous- marins eux-mêmes n’y étaient perçus, par le droit de la paix ou de la guerre, qu’autant qu’ils naviguaient en surface ou s’attaquaient à des navires qui s’y trouvaient.

 

c- Aujourd’hui, le droit de la mer a pris acte de son caractère pluridimensionnel. L’appréhension progressive du fond des mers par les hommes qui a pris la valeur d’une grande découverte, comparable à celle d’un continent inconnu a  ainsi restitué au milieu océanique son ensemble dimensionnel. C’est, avec l’apparition de “l’éldorado du siècle” (le fond des mers et des océans) aux alentours des années soixante-dix, révélant le lit de la mer porteur de richesses minérales considérables([11]), que l’exploitation des fonds marins -  couvrant à la fois les dimensions économique, technologique, géographique et surtout écologique (car elle s’ajoute aux risques de pollution qui jusque - là venaient de la terre ou des navires, spécialement des pétroliers) - constitue l’enjeu le plus explosif et jusque - là ignoré du droit classique de la mer.

Ce fabuleux trésor gisant sur les fonds marins depuis des millénaires a, depuis sa découverte grâce à une technologie appropriée, “excité l’imagination des juristes et suscité bien de convoîtises”([12]). Cette question prit une acuîté particulière lorsque l’Assemblée Générale des Nations Unies, dans une Déclaration de principes votée le 17 décembre 1970, proclama le lit des mers et le fond des océans  au-delà de la juridiction nationale “héritage commun de l’humanité”([13]). La question s’est alors posée de savoir où s’achevait la compétence des riverains où commençait ce patrimoine commun? L’importance de l’enjeu explique l’urgence d’une règlementation d’ensemble des ressources et des usages de la mer.

A ce dessein, la Troisième Conférence des Nations Unies sur le droit de la mer s’ouvre à New York le 3 décembre 1973. Ses travaux ont pratiquement commencé en juin 1974 à Caracas à un moment où l’économique primait aux Nations Unies : les débats se déroulaient sur le nouvel ordre économique international et sur les droits et devoirs économiques des Etats. Le 20 avril 1982 une Convention multilatérale fut adoptée à New York et signée par 119 Etats le 10 décembre 1982 à Montego Bay à la Jamaïque([14]). Cette Convention n’est entrée en vigueur qu’en 1994 (le 16 novembre) c’est-à-dire quelques 12 ans plus tard([15]). Cela est dû aux difficultés et blocages rencontrés lors des négociations sur la Partie XI relative à l’exploitation des fonds marins par un mécanisme institutionnel créé pour la gestion internationale de ces fonds, patrimoine commun de l’humanité. L’institutionnalisation des fonds marins allait, sans aucun doute, devenir le moteur principal des bouleversements de la mer et de son droit. La mer partagée et le droit classique refondu à partir de nouveaux principes résultants de l’essor technologique et exprimant la révolution politico-juridique qui l’atteint. “Le vent de la révolte souffle aussi sur les océans”([16]).

D’ores et déjà, nous nous trouvons face à un “gigantesque effort de révision du droit de la mer dont les conséquences sont considérables et concernent tous les chapitres de ce droit”([17]).La Résolution (2750 (XXV) qui a provoqué cette opération de refonte sans précedént du droit classique de la mer devait donc aboutir à la Convention multilatérale. Signée en 1982  à Montego  Bay,  entrée  en  vigueur  en  1994  grâce  à   l’adoption (la même année) de l’Accord de juillet véhiculé lui aussi, par une résolution des Nations Unies([18]).Cette dernière résolution véhiculant l’Accord de juillet 1994 a opéré un tournant significatif en ce qui concerne la gestion internationale des fonds marins - passée du “dirigisme” au “libéralisme”. Toute cette “redondance résolutionnaire” constitue, dès à présent avec la Convention de Montego Bay, le “nouveau droit de la mer”, ou le droit positif de la mer.

Il s’agit, donc, d’un changement dans l’optique classique des sources. A la coutume traditionnelle pilier du droit de la mer, s’ajoute la résolution entraînant de facto une modification de la coutume - De même, le traité est placé à un niveau supérieur à la coutume et aux autres sources du droit international. Pour les négociateurs à la 3ème Conférence sur le droit de la mer, la convention apparaissait séduisante par sa clarté, sa précision et sa rapidité dans la production des normes. Or, ces caractères ont vite été remis en cause et le processus conventionnel fut pris de vitesse par le processus coutumier bénéficiant d’une capacité plus grande de modeler le réel.  Avec le nouveau droit de la mer, la coutume a, néanmoins, pris une signification nouvelle correspondant à la rapidité des évènements et à la multiplicité des dimensions de la mer et de son droit. Elle se distingue, dès lors, par la  brièveté  de sa constitution dans un contexte socio-juridique profondément transformé. Il s’agit, dès lors, d’une coutume nouvelle où l’intensité remplace la lenteur. L’élément  matériel n’est plus une répétition très longue dans le temps, elle s’inscrit plutôt dans la durée (bergsonnienne), dans la densité du mouvement. L’élément psychologique : la croyance dans l’obligation, est devenue contemporaine de la célérité des décisions reflétant ainsi la course rapide de cette fin de siècle marquée par la précipitation des évènements et l’impact d’une nouvelle technologie hautement sophistiquée.

La “résolution” - objet de notre étude - qui a provoqué l’institutionnalisation du droit de la mer et aussi l’entrée en vigueur  de la Convention de Montego Bay a, par la généralité de son contenu et la souplesse de son interprétation ([19]), contribué à des transformations capitales au niveau de l’élaboration du nouveau droit de la mer. S’agit - il d’une nouvelle source de droit international? Une analyse d’ensemble de la résolution - cet “instrument concerté non - conventionnel”([20]) -  s’avère nécessaire.

 

II -  Un apport nouveau : la résolution

Instruments normatifs souples - affranchis des conditions d’entrée en vigueur des textes conventionnels et de leur effet généralement limité aux Etats les ayant ratifiés - les résolutions, adoptées généralement au sein de l’organe plénier d’une organisation internationale et n’exigeant pour leur adoption que la majorité des deux tiers (s’agissant des questions importantes), gagnent en souplesse et rapidité ce qu’elles perdent en sécurité juridique.

C’est d’abord au sein de l’Assemblée Générale des Nations Unies que les nouveaux Etats  (Les pays du Tiers-Monde), forts de leur nombre, ont utilisé la “ dynamique majoritaire” pour adopter une résolution, mode privilégié d’expression de leurs revendications. Ainsi, et en ce qui concerne le nouveau droit de la mer, c’est une résolution - (la Résolution A/2749(XXV) ([21]) - qui a généré, nous l’avons vu, l’institutionnalisation du droit de la mer en proclamant en 1970, les fonds marins patrimoine commun de l’humanité et leur gestion par un mécanisme international dénommé “l’Autorité internationale des fonds marins”, provoquant crescendo la partage de la mer et de ses fonds (un nouveau Yalta s’est, depuis, installé sur la mer et les océans ). C’est aussi une résolution - (la Résolution A/Res/263) ([22]) qui a  véhiculé en 1994 l’Accord de juillet portant une refonte totale de la Partie XI de la Convention du 10 décembre 1982 constituant, au surplus, une plate-forme à l’entrée en vigueur de ladite Convention. Qui plus est, l’Accord sus-mentionné et la Convention constituent ensemble, depuis le 16 novembre 1994, le droit positif de la mer. Autrement dit, ces deux résolutions - la première affirmant le “système dirigiste” qui a profondément révolutionné le droit de la mer classique, la seconde réaffirmant le système libéral sur les océans - ont constitué à chaque fois un tournant dans l’élaboration du nouveau droit de la mer.

La question s’est alors posée de savoir si cette nouvelle technique d’élaboration de règles juridiques pourrait constituer une nouvelle source du droit international de la mer? cette question a suscité des débats houleux tant à la 3ème Conférence des Nations Unies sur le droit de la mer qu’au sein de la Commission préparatoire créée en 1982 par une résolution lui conférant la mission de mettre en place  les nouvelles institutions du droit de la mer, que lors des discussions de l’initiativité du Secrétaire Général de l’O.N..U. qui ont duré plus de quatre ans pour aboutir enfin à  un résolution qui a véhiculé, comme nous venons de le dire, l’entrée en vigueur du nouveau droit de la mer.

Si, toutefois, le droit international est placé sous le signe du changement et sous ce changement il y a toujours la permanence, si ce droit en “quête de son identité”([23]) a connu “des flux et des reflux”([24]) à l’image de la mer dans le célèbre vers de Paul Valéry - “La mer, la mer toujours recommencée” - le droit international, comme dit le Professeur Prosper Weil, “n’a jamais cessé de changer, il est aussi, comme la mer, toujours le même, bien que toujours recommencé”([25]) .

Par conséquent - et vu l’importance qu’ont revêtu les résolutions depuis plus de quarante ans dans l’élaboration du  droit international en général et le droit de la mer en particulier([26]) -  Qui plus est, cette technique également appréciée par les Puissances industrielles qui se plaisent de plus en plus à l’utiliser depuis les années quatre-vingt-dix et la chute du bloc Soviétique (la guerre du Golfe par exemple, a été décidée et menée sous l’égide des Nations Unies -.Nous nous proposons dans un premier temps de dresser un panorama des résolutions des Nations Unies (les plus importantes) et de leur impact dans la formation du droit international public (A). Et, dans un second temps la portée juridique des résolutions qui ont véhiculé le nouveau droit de la mer et toute la controverse qui a porté sur le caractère obligatoire de ces “instruments concertés non - conventionnels”(B).

 

A- Panorama des résolutions

Les résolutions ont connu une grande intensité tout au long de la décennie des années soixante dix qui s’est partiellement apaisée depuis (a). Si, toutefois les Pays du Tiers - Monde, conscients du poids nouveau que leur conférait leur nombre au sein de l’Assemblée Générale, n’ont pas tardé à considérer cet organe comme l’instrument d’une sorte de “pouvoir législatif international” et par conséquent, conférer à la résolution une force juridique obligatoire; les Puissances industrielles ont toujours considéré les résolutions comme inaptes à engendrer des obligations juridiques (b).

 

a- Floraison et enjeu

Dès le début des années soixante-dix, le “Tiers - Monde” (regroupant à la fois les pays non alignés et les pays en développement ou groupe des soixante - dix - sept) avaient entamé une critique des structures économiques mondiales insistant sur l’injustice du traitement qu’elles leur imposaient. La crise de l’énergie et les désordres monétaires qui apparurent dans les années soixante-dix devaient donner une dimension nouvelle à leurs récriminations et les faire passer au niveau de la formation de “principes légitimes”. Ce sont les structures qu’ils veulent modifier à commencer par la première en importance, celle du commerce international. Donc, vote de l’Assemblée Générale de l’O.N.U. en 1961, d’une première résolution sur “le commerce internationnal, principal instrument du développement”([27]).

A partir de 1974 l’Assemblée Générale de l’O.N.U. adopta une série de résolutions parmi lesquelles les textes fondateurs du nouvel ordre économique international qui marquent le point culminant de la bataille menée par le Tiers - Monde pour établir les principes de la justice légitime des peuples de la terre contre la tyramie de la puissance d’une légalité - à leur avis - arbitraire, inéquitable et illégitime. Il s’agit des résolutions relatives à l’instauration d’un Nouvel ordre économique international, au Programme d’action qui lui est joint et de la résolution connue sous le non de “Charte des droits et devoirs économiques des Etats”([28]).

Si ces textes contiennent l’essentiel des revendications des pays en développement telles, la coopération, l’aide et la dualité des normes. C’est surtout, la Conférence des Nations Unies pour le commerce et le Développement (C.N.U.C.E.D.) qui va poursuivre ses recherches et multiplier ses études pour affirmer la définition de ces normes nouvelles. Pour se pérenniser et assurer la poursuite des revendications du Nouvel ordre économique international, la C.N.U.C.E.D. créa un secrétariat permanent qui devint un très actif atelier au service de la coopération et du développement comme elle décida la tenue d’une réunion tous les quatre ans pour l’établissemernt d’un bilan sur l’avancement de ses travaux. Ce bilan à intervalle régulier s’est manifesté dans les résolutions de l’Assemblée générale sur les stratégies internationales du développement englobant les trois dernières décennies([29]).

La dernière résolution de la C.N.U.C.E.D : résolution (45/199) du 21 décembre 1990, proclamée après la guerre du Golfe (2 août 1990 - 28 février 1991) qui mobilisa totalement l’attention de l’opinion publique, exprime un tournant dans la politique des Nations Unies. Le Professeur M.Flory parle d’une “stratégie nouvelle : de révolutionnaire, elle va devenir réformiste et retrouver avec le souci d’une stricte orthodoxie juridique, la protection du formalisme juridique; la preuve en est donnée par l’abandon total de la terminologie du N.O.E.I... Aussi, entre-t-on, à partir de 1990, dans une nouvelle phase qui contraste avec les précédentes”.

Du dirigisme utopique prônée depuis les années soixante par les pays du Tiers - Monde nous passons à un libéralisme qui sort victorieux des crises consécutives aux chocs pétroliers (1973) et aussi de la disparition des blocs en 1989. L’idée d’une communauté internationale solidaire disparaît sous l’effet de la mondialisation au profit d’une économie libérale du marché. L’O.N.U. et ses institutions spécialisées s’alignent sur le dogme libéral. “A défaut d’alternative, c’est le règne de la pensée unique, libérale et américaine qui s’impose”([30]). Cette nouvelle technique aux enjeux multiples, politique, morale, juridique etc... a suscité des attitudes contradictoires quant à l’appréciation de son autorité juridique.

 

b- Attitudes contradictoires des pays développés et des pays en développement

1-  P.V.D. - caractère obligatoire des résolutions

L’arrivée en masse des pays du Tiers-Monde dans les enceintes internationales leur permit, comme nous l’avons vu, de s’assurer  par le seul poids de leur nombre le contrôle dedites majorités. Il leur suffisait alors de s’unir face à un problème donné pour faire adopter une résolution à son propos. (Nous savons qu’au sein de l’Assemblée Générale de l’O.N.U. ils détiennent à eux seuls plus des deux tiers des votes). Ainsi, surtout dans les années soixante-dix, ils utilisent la “mécanique du nombre” pour faire voter des résolutions auxquelles ils voulaient conférer le caractère obligatoire d’une règle juridique et substituer ainsi la règle de majorité à celle de l’unanimité.

Or, la règle de la majorité a fait l'objet de diverses critiques: certains lui reprochent de favoriser le vote plus que la négociation, d'autres estimant que, du moins sous la forme dans laquelle elle est pratiquée à l'Assemblée Générale des Nations Unies («1 Etat, une voix), elle aboutissait à faire triompher une conception toute formelle de l'égalité. Ce dernier écueil explique l'aménagement des pondérations des voix, notamment dans les organisations financières et économiques, telles que par exemple, la Banque Mondiale, le Fonds monétaire international, en fonction du montant des participations au financement de l’organisation ou de l’importance effective de l’autorité économique des différents Etats membres.

Pour revendiquer l'indépendance économique devant logiquement prolonger l'affranchissement politique dont ils venaient pour la plupart de bénéficier, les nouveaux Etats – faisant bloc au sein du «groupe des 77» ou du mouvement des non-alignés – en appelèrent-ils à la légitimité contre la légalité. «L'affirmation de leur droit au développement passant par la refonte des concepts et des règles sur lesquels s'était affirmé le pouvoir des Puissances nanties, ils invoquèrent spontanément la justification morale de leurs exigences pour en faire admettre le caractère obligatoire, sinon même en certains cas, impératif. Ils s'appuyèrent, pour ce faire notamment, sur les implications logiques du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, établi près de vingt ans auparavant par les anciens Etats eux-mêmes, à l'article premier de la Charte des Nations Unies».

Qui plus est, la procédure majoritaire ne leur conférait pas seulement le pouvoir procédural de la décision par voie de résolution mais également l'appui implicite de sa fonction légitimante. Aussi la force morale de cette opinio juris affirmée «préalablement» à sa mise en pratique effective fut-elle largement «considérée comme suffisante par ces Etats pour être à l'origine d'une nouvelle règle générale obligatoire» ([31]). Telle n'est sûrement pas l'attitude des pays industrialisés.

 

b- Industrialisés: les résolutions inaptes à engendrer des obligations juridiques.

Si dans un premier temps, les pays occidentaux mêlèrent l'ensemble de leurs voix à celles du Tiers-monde dans l'adoption de certaines résolutions déclaratoires, comme par exemple en 1960 la 1514, ou en 1967 la 1803 relative à “la souveraineté permanente sur les ressources”([32]), ou en 1970 la 2749 (XXV) relative «au fond des mers patrimoine commun de l'humanité» et à «l'Autorité internationale des fonds marins» ([33]); ils en restent, pour l'essentiel, pour une interprétation volontairement formelle de la valeur des résolutions qu'ils considèrent en elles-mêmes inaptes à engendrer des obligations juridiques. Ils s'appuient sur la partie institutionnelle de la Charte pour rappeller que les textes votés par l'Assemblée Générale hors du cadre de mise en œuvre de ses compétences internes ne peuvent être juridiquement liants.

Imputables à la seule organisation dont elles émanent, les résolutions ne sauraient, selon eux, être assimilées, à une forme nouvelle d'accord international. Et pourtant, l’ Accord de juillet 1994 relatif à l'application de la Partie XI de la Convention du 10 décembre 1982 sur le droit de la mer, qui consacre au surplus la thèse libérale des pays industrialisés sur l'exploitation et la gestion des fonds marins, fut adopté par une résolution de l'Assemblée Générale et soumis à la ratification des Etats pour sortir de l'étape provisoire et entrer définitivement en vigueur(4). Ici se pose, en effet, la question de la portée juridique de ces résolutions. Peut-on les considérer comme source du nouveau droit de la mer?

 

B- Portée juridique

Si les résolutions ou recommandations de l'Assemblée Générale des Nations Unies ne peuvent, selon une doctrine affirmée et une large opinion internationale, revêtir qu'une autorisation juridique «restreinte», beaucoup considèrent qu'il s'agit plutôt «d'instruments capables de réaliser une coutume instantanée». On a même parler à ce propos, de «pré-droit», de «para-droit» ou de «pseudo-droit» ([34]). Si ces règles en voie d'élaboration comblent un vide juridique, elles n'ont souvent qu'une “valeur politique ou morale» ([35]). Il s'agit, en d'autres termes, d'un processus parallèle d'élaboration des règles de droit qui a, toutefois besoin d'un cheminement plus ou moins long conduisant à leur consécration dans un acte international à valeur juridique obligatoire.

a- La résolution: un «processus parallèle» d'élaboration du droit international public

Les résolutions, actes qui n'ont juridiquement pas de force obligatoire, se définissent à la fois en fonction de la qualité de leur auteur et par la nature particulière de leur contenu. Ainsi, elles peuvent être une invitation adressée par une organisation internationale à un ou plusieurs destinataires, en vue d'adopter un comportement déterminé, action ou abstention; cela peut être, aussi, une invitation ne concernant qu'elle-même à observer une certaine conduite, ou encore l'affirmation de quelques principes. Suivant le contenu de l'acte, ce dernier a une appelation particulière. Mais ceci ne se vérifie pas systématiquement car le même terme peut recouvrir des réalités différentes. Les termes comptent moins que la réalité qu'ils recouvrent. A l'expression d'actes non obligatoires correspondent plusieurs termes; on peut cependant adopter le terme de «résolution» qui est général à toutes ces appelations.

Néanmoins, si le mode d'élaboration de ces actes n'a pas subi véritablement de modifications importantes, on remarque un affinement dans l'utilisation des termes employés pour les définir. On émet des distinctions entre ces actes en fonction de leur objectif; on assure une gradation entre eux. De plus en plus fréquemment, les résolutions sont qualifiées en fonction de leur objectif, de leur contenu,du domaine qu'elles recouvrent. On qualifie de Charte par exemple, la Résolution 3281 (XXIX) adoptée le 14 décembre 1974 qui porte sur les droits et devoirs économiques des Etats; ou, à la Conférence des Nations Unies sur l'Environnement qui s'est tenu à Stockholm du 5 au 16 juin 1972, ou bien encore au Comité des fonds marins, proclamation de la «Déclaration des principes régissant le fond des mers et des océans ainsi que leur sous-sol au-delà de la juridiction nationale, patrimoine commun de l'humanité et soumis au régime international à établir».

Donc ces actes, en tant qu'éléments du processus parallèle de formation du droit international, ne doivent pas être examinés en eux-mêmes mais comme porteurs ou «révélateurs» d'une norme qui se constitue au moins partiellement par leur entremise. Le consentement des Etats n'étant pas formalisé, aucune objection de principe ne s'oppose à ce qu'il en soit ainsi. Les résolutions constituent donc l'expression d'un sentiment ou d'une proposition d'obligation juridique qui dépasse la valeur propre de l'acte et que, accompagnée d'une pratique adéquate, elles conduisent à la formation d'une coutume. Elles peuvent, suivant les circonstantes, constituer des «actes-support» servant à consacrer une coutume en formation, ou être le «point de départ» ([36]) de l'expression d'une revendication qui peut prendre des différentes formes.

 

1- «Actes-support» servant à consacrer une coutume.

Si des résolutions peuvent, en fait, frayer la voie à de nouveaux développements du droit international elles ne sauraient, dit Charles de Visscher, dans la mesure où elles dépassent l'interprétation proprement dite de la Charte, être envisagées comme une «technique nouvelle d'élaboration du droit international susceptible de donner naissance à l'établissement ipso facto de liens juridiques obligatoires”([37]). Michel Virally considère, cependant, que ces «pseudo-règles exercent, tout de même, une certaine contrainte morale et politique. Le processus d'élaboration se poursuivant, elles peuvent s'affirmer avec le temps comme des règles obligatoires» ([38]). Ainsi, et suivant les circonstances, les actes des organisations internationales pourront être un moyen de consacrer certaines revendications qui ne sont mises en pratique que de façon limitée. Ils seront des actes-support.

Selon cette hypothèse, une résolution va consacrer une certaine pratique des Etats et lui donner une portée juridique plus importante. René-Jean Dupuy parle d'un processus qui «va de la coutume sauvage au droit déclaratoire», c'est-à-dire «d'un procédé coutumier original à une formulation par voie déclarative ([39]). Ainsi, les résolutions vont servir dans ce nouveau processus comme un support, une préparation nécessaire dans la création d'une règle de droit. Elles n'interviennent pas toujours au même moment du parcours; elles représentent des étapes différentes et leur prolongement n'aboutit pas toujours au même résultat; leur intervention est cependant positive. C'est ainsi qu'une résolution peut déclarer ou consacrer une coutume dite «sauvage», en lui donnant peu ou prou la force juridique d'une coutume universelle.

Par conséquent, une résolution ne peut à elle seule donner directement naissance à une norme coutumière; elle peut, en revanche, être à l'origine de la création d'une coutume. C'est ainsi qu'elle peut prendre place dans le processus coutumier, dans la mesure où elle consolide une pratique dont la cohérence et la pertinence devraient être considérée comme telle. Les résolutions déclaratives([40]) procèdent,en effet, par l'affirmation catégorique d'une règle; elles prennent l'allure d'une injonction. Par ce biais, “la coutume sauvage passe d'un cadre régional et limité à un cadre universel et se voit consacrée sur le plan international”. Ainsi, les formes nouvelles de la pratique, notamment celles qui sont liées à des manifestations collectives au sein des organisations internationales et intergouvernementales, permettent à l'ensemble des Etats d'exprimer leurs positions et de participer au processus de règlementation juridique même s'ils ne participent pas directement aux activités en cause.

Les résolutions peuvent, également, servir à mettre en route des revendications, elles seront alors des «actes point de départ».

 

2- «Actes-point de départ»

C'est le cas par exemple des “résolutions-programmatoires”([41]). Les Etats du Tiers-monde prenaient souvent l'initiative de telles résolutions dont la particularité est de fixer des résultats à atteindre; leur caractère est essentiellement prospectif; elles se bornent à proclamer une éthique et n'ont pas une valeur juridique obligatoire. C'est donc un droit normatif qui reste au niveau des principes et des objectifs sans s'occuper de la règlementation détaillée qui reviendra aux législations nationales. Ce sont des normes «d'incitation» qui se réclament d'une éthique que l'on on a dénommé être une soft law, c'est-à-dire du droit vert, du droit mou ou encore du droit inachevé(2). Il s'agit, en fait, de «résolutions-recommandations» ([42]) qui, insérées dans une suite de précédents d'origine organique, peuvent avoir une “valeur coutumière”([43]). Mais Alors, une série de conditions sont exigées pour qu'une résolution puisse aboutir à une coutume: elle doit formuler des règles de droit, elle doit montrer l'existence d'une «volonté générale réelle» ([44]), et elle doit être suivie d'une pratique générale conforme aux règles formulées par la résolution. Il ne faut donc pas qu'elle reste théorique, mais qu'elle soit effectivement en application.

Quoi qu'il en soit, une résolution ou répétition de résolutions peuvent être à l'origine de la création de la coutume, un point de départ ou un support dans le processus de formation du droit international. Elle constitue donc un «processus parallèle» qui doit être complété pour devenir une source du droit international public.

 

b- Quid des résolutions véhiculant le nouveau droit de la mer?

1- Résolution 2749 (XXV) du 17 décembre 1970.

La Déclaration des Principes régissant “le fond des mers et des océans ainsi que leur sous-sol au-delà des limites de la juridiction nationale» adoptée le 17 décembre 1970 et les proclamant “patrimoine commun de l'humanité», a été considérée comme obligatoire par les Tiers-mondistes et non obligatoire par les Industrialisés. Or, si la portée obligatoire d'une résolution dépend de sa nature juridique, l'approche de cette question ne peut être que dynamique, car “c'est sous cet angle qu'on peut suivre sa trajectoire et cela permet d'évaluer son importance» ([45]). La question est, donc, de savoir si ces résolutions constituent une source du droit de la mer et si cette nouvelle source a une valeur juridique obligatoire? Les défenseurs d'une “Autorité centralisée” sur les fonds marins lui confèrent une force obligatoire, soit qu'ils considèrent que c'est un principe de droit coutumier ou une règle de jus cogens. Or, cette attitude a suscité des critiques de la part des défenseurs d'une gestion libérale des fonds marins avec une Autorité internationale à pouvoirs très réduits.

 

a- P.V.D: caractère obligatoire déduit de la Résolution

Les pays en développement dans leur ensemble conféraient un caractère obligatoire à la Résolution 2749 (XXV). Ainsi, le délégué du Mexique y voyait une «volonté nette et juridiquement exprimée»; il affirmait que les activités contraires seraient ultravires et en violation des principes du droit international. Le groupe des «77», dans une lettre du 24 avril 1977, réaffirme le caractère obligatoire de ses principes et que tout acte unilatéral ou traité contraire serait illégal. Car, disaient-ils, les modalités d'adoption de la Résolution 2749 (XXV) permettraient d'attribuer force obligatoire à cette Déclaration. Ayant été adoptée sans aucune voix contre, elle reflète l'existence d'un consensus sur son contenu([46]).

Cependant, nombreux étaient ceux qui ont refuté cette thèse arguant «qu'en ne retenant que l'aspect quantitatif, l'interprétation se revèlait sans fondement juridique». En effet, pour y voir une résolution obligatoire, il faudrait pour cela reconnaître à l'Assemblée un pouvoir quasi - législatif s'exerçant à l'égard des Etats; or, la Charte ne consacre aucun pouvoir de ce genre et aucune règle coutumière d'habilitation ne ressort de la pratique. Faudrait-il alors attribuer à un vote unanime une portée obligatoire pour tous les Etats? L'article 18 de la Charte ne permet pas d'attribuer aux résolutions adoptées à l'unanimité des effets plus étendus qu'à celles adoptées à la majorité; de même que les votes négatifs et abstentions limitent la portée du vote ([47]). Par conséquent, et malgré les tentatives faites à San Francisco (qui ont d'ailleurs échoué) pour conférer à l'Assemblée Générale le pouvoir de promulguer des normes internationales, les résolutions de l'Assemblée Générale des Nations Unies ne sont pas créatrices de droit. Elles ne produisent pas d'obligations juridiques. Elles ne sont pas retenues parmi les sources du droit appliquées par la Cour Internationale de Justice en vertu de l'article 38 du Statut de la Cour. De plus, la Déclaration des principes n'énonce pas expressément une interdiction d'activité à l'encontre des Etats. Cette interdiction est en réalité contenue dans la Résolution 2754 instituant le Moratoire. Or, le mode d'adoption de cette Résolution ne reflète pas l'existence d'un consensus([48]).

On a pu soutenir également que la «Déclaration des Principes» obligerait juridiquement en ce qu'elle serait une résolution qui viendrait consacrer un droit préétabli. A cet égard, elle exprime le consensus de la communauté internationale organisée sur les aspects fondamentaux du développement progressif du droit international et, par conséquent, elle aura une valeur juridique précise qui oblige les Etats à s'abstenir de toute activité contraire à leur contenu. Même si cette interprétation confère une valeur juridique particulière aux résolutions déclaratoires, elles ne peuvent devenir pour autant créatrices de droit plus que d'autres résolutions. Simplement,leur contenu consiste soit en des règles coutumières soit en des principes généraux de droit. L'insertion de ces principes dans les résolutions n'a pas pour effet de convertir en règle obligatoire des concepts qui, auparavant n'avaient pas ce caractère. Le fondement ultime du caractère obligatoire des règles ou des Principes déclarés, reconnus ou confirmés par une résolution, réside finalement dans le fait que ce “sont des règles coutumières ou des principes généraux de droit» ([49]).

 

b- Industrialisés : Principe non obligatoire, dans sa forme et dans son contenu

Le nouveau principe énoncé par cette résolution: «le patrimoine commun de l'humanité», n'est pas un principe de droit coutumier préexistant à la Déclaration 2749 (XXV). La coutume, nous le savons, est constituée de deux éléments: la pratique des Etats et l'opinio juris concordante. Or, en la matière il n'y a pas de conduite préalable des Etats. Il faut bien reconnaître, comme disait le Professeur R.J. Dupuy, que sur les fonds de 5.000 mètres «on chercherait en vain les précédents» ([50]). La concordance des opinions juridiques n'exitait pas non plus: avant l'adoption de la Déclaration, la possibilité de conduites non conformes au contenu de la notion de patrimoine commun de l'humanité était envisagée: ainsi par exemple le Président Nixon avait exprimé le 23 mai 1970 la volonté des Etats-Unis de ne pas renoncer à l'exploitation. Il n'y a pas non plus création instantanée de coutume lors de l'adoption de cette Résolution. Même si du consensus qui se dégage de son adoption on en déduisait une opinio juris des Etats concordante, la pratique étatique conforme manque. La pratique postérieure est même contraire au contenu de cette notion ([51]). Donc, l'adoption par certains Etats industrialisés de légilations nationales sur l'exploitation des fonds marins constitue une conduite en contrariété avec le contenu du concept. Car seule l'abstention de légiférer (ce qui n'est pas le cas), reconnaissant ainsi que la communauté internationale est seule habilitée à la faire, aurait été une pratique conforme entraînant la consécration du principe. Par conséquent, le principe de patrimoine commun de l'humanité énoncé par la Résolution du 17 décembre 1970 ne constitue pas un principe obligatoire de droit coutumier.

D'autres devaient soutenir que le patrimoine commun de l'humanité proclamé en 1970 était un nouveau principe de jus cogens. Mais, cette thèse fut refutée au motif que le critère le plus significatif en matière de jus cogens est, précisément, la teneur de la norme dont le caractère impératif résulte «de son importance dans la vie internationale» ([52]). La question s'est alors posée de savoir si la Résolution 2749 (XXV) pouvait conférer au patrimoine commun de l'humanité une force obligatoire déduite de la règle de jus cogens étant donné que ce principe est la base de l'établissement d'un régime juridique équitable et devant profiter à l'humanité toute entière. On a pu admettre que ce principe relèverait du jus cogens dans la mesure où on peut parler d'un véritable ordre public économique des océans et que celui-ci traduise l'aspiration à un ordre international économique plus juste. Or, cette possibilité était précaire dans la mesure où la norme d'interdiction ne répondait pas aux conditions posées par l'article 53 de la convention de Vienne sur le droit des traités ([53]); elle n'est pas non plus acceptée par la communauté internationale dans son ensemble; car les pays industrialisés, qui ont adopté des législations nationales, ont refusé de considérer ce principe comme obligatoire dans sa forme et dans son contenu. Par conséquent, la Résolution 2749 (XXV) - fondement du patrimoine commun de l'humanité - ne peut se prévaloir de l'opposabilité erga omnes, et ne peut par conséquent, doter le principe P.C.H. de valeur obligatoire.

 

c- Réaction de la Doctrine

La Déclaration des principes est, selon un important courant doctrinal([54]), une source infra-juridique remarquable, une excellente illustration de ce qu'on a appelé la «coutume sauvage» ou «soft law» oudéveloppé depuis quelques décennies. Par son contenu, elle constitue bien une déclaration; elle porte, certes, sur des principes mais c'est au niveau des finalités que ces normes sont posées; il s'agit plutôt de principes généraux et imprécis; car elle ne donne pas une définition juridique des principes posés, ni elle énonce expressément une interdiction d'activité d'exploitation à l'encontre des Etats. La Déclaration des principes sur le fond des mers et des océans se situe surtout de lege ferenda([55]); elle proclame des principes dont «le respect n'est pas acquis dans la pratique» ([56]), mais qui serviront de base à la Convention. Elle n'a donc pas de valeur propre et n'est que le point de départ de la formation d'une coutume si, toutefois, la pratique des Etats le confirme. Or, Cette Déclaration a été vite contestée par les pays industrialisés et la pratique internationale s'est faite à son encontre. Par conséquent «l'opinio juris» et les pratiques nationales concordantes lui faisant défaut, elle restera sans suite coutumière générale. On a pu dire qu'elle pose davantage un «droit programmatoire» ([57]) pour l'avenir; car il s'agit d'un «droit désiré et non encore établi» ([58]), des «standards de comportement qui feront l'objet d'une élaboration ultérieure et qui ne font pas partie encore du droit positif» ([59]).

Par conséquent, la résolution 2749 (XXV) ne peut être considérée, faute de force obligatoire, comme une source du droit de la mer. Elle constitue plutôt le point de départ d'un processus normatif nouveau qui consiste à adopter des principes politiques en estimant que celles-ci pourront se transformer sous la pression du temps et des événements en règles juridiques. Si cette résolution fut confirmée dans la convention du 10 décembre 1982, elle n'en a pas pour autant revêtu la valeur juridique d'une source obligatoire parce que la Convention elle-même n'est entrée un vigueur que beaucoup plus tard avec la condition, toutefois, d'une refonte totale de la partie XI relative à l'exploration et à l'exploitation des fonds marins proclamés par ladite résolution, patrimoine commun de l'humanité. De même que la pratique internationale dans ce domaine s'est faite à son encontre. Ce qui veut dire qu'elle n'a pas, non plus, acquis valeur positive par la voie coutumière. Peut-on dire autant des résolutions I et II de l'Acte final issu de la 3ème Conférence et de la Résolution (A / Res / 48 / 263) véhiculant l'Accord de juillet 1994 qui a servi comme locomotive pour l'entrée en vigueur de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer?

 

2- Résolution I et II de l'Acte final de Montego Bay et Résolution (A/Res/48/263) véhiculant l'Accord de juillet 1994

Soumettre la gestion internationale des fonds marins à une Autorité centralisée proclamée dans une Résolution de l'Assemblée Générale des Nations Unies, gouvernée de surcroît par la «nouvelle majorité» (les pays Tiers-mondistes), ne pouvait, nous l’avons déjà dit, que susciter de grandes inquiétudes auprès des pays industrialisés qui ont déjà investi des sommes énormes dans leurs recherches et leurs activités de prospection les autorisant à s'engager dans la grande aventure de l'exploitation de ces ressources, et ne voudraient à aucun prix se trouver en dehors du droit international général pour les mers et les océans, comme ils n'envisageaient nullement être en situation illégale ou illicite par rapport à ce droit.

Ainsi, et lors des négociations à la 3ème Conférence, tant au sein de la Plénière qu'au sein du groupe des experts juridiques, des discussions furent engagées sur ce point afin de parvenir à un compromis permettant de rendre le système de la Partie XI plus opératoire. A cet effet, les «Etats législateurs» émirent l'idée d'un système transitoire qui, avant l'entrée en vigueur de la Convention, leur permettrait d'obtenir les garanties nécessaires aux activités d'exploration qui les intéressent. L'idée d'un tel système apparut finalement sous un bon jour aux P.V.D. qui y voyaient “le moyen de faire adhérer les pays industrialisés au nouveau régime de la Partie XI de la Convention”([60]).

Il faut rappeler ici que cette idée de l'établissement d'un système permettant de protéger les investissements effectués par les compagnies privées dans des activités minières océaniques pendant la période transitoire, précédant l'entrée en vigueur de la Convention, fut présentée pour la première fois à la Conférence en 1980 par la délégation des Etats-Unis([61]). Ce n'est que deux années plus tard qu'apparut la première proposition concrète quant à l'établissement d'un tel système en réponse aux appels pressants du Président de la Conférence([62]). La première proposition fut soumise par l’ex R.F.A., le R.U., les Etats-Unis et le Japon([63]). Elle fut suivie d'un projet de résolution du groupe des «77» ([64]). Un certain nombre de suggestions officieuses furent présentées à la Conférence dont une proposition française([65]). Les négociations sur le sujet se poursuivirent jusqu'à la fin des travaux de la Conférence et le système provisoire fut établi par les Résolution I et II de l'Acte final([66]). La première portant création de la Commission préparatoire «de l'Autorité internationale des fonds marins et du Tribunal international du droit de la mer», la seconde relative à «la protection des investissements préliminaires».

 

a- Force obligatoire des Résolutions I et II

D'un point de vue formel, il n'y a pas lieu de distinguer, la résolution établissant la Commission préparatoire de celle prévoyant des activités préliminaires. En vertu du principe du paquet retenu par la Conférence, les résolutions ont été adoptées le 30 avril 1982 en même temps que le texte même de la Convention dans le cadre d'un vote unique. Elles sont donc partie intégrante d'un ensemble de compromis politique qu'on ne peut dissocier. Toutes deux ont une existence limitée dans le temps. La Résolution I portant création d'une Commission préparatoire destinée à mettre sur pied une nouvelle organisation internationale, peut être considérée comme classique; la résolution II portant sur les activités préliminaires d'essence essentiellement politique se justifie par des considérations pragmatiques d'ordre économique et financier. Elle ne peut s'appuyer sur aucun précédent et “représente le prix politique payé par un groupe de pays, en l'occurrence les pays en développement, pour obtenir l'adhésion d'un autre groupe, celui des pays industrialisés, et ainsi assurer la viabilité d'une partie essentielle de la convention”.

La Commission préparatoire, en vertu des attributions que lui confère cette résolution, a pu jouer un rôle très important dans la préparation de la mise en place de l'Autorité internationale des fonds marins; comme elle a pu, tenant compte des orientations politiques adaptées et suivant une approche pragmatique des problèmes posés, effectuer des progrès considérables à l'égard des investisseurs - pionniers en modifiant leurs obligations vis-à-vis de l'Entreprise: financement, transfert de technologie, problématique du site réservé ainsi que la question relative à la formation de son personnel technique et administratif.

La Commission a pu, en effet, sur la base de ses travaux accomplis au cours de ses années d'existence, parvenir à l'adoption d'un bon nombre d'accords qui ont constitué «une véritable opération de réécriture de la résolution II»([67]). Néanmoins, et malgré la bonne volonté d'éliminer les obstacles qui empêchaient, jusque-là, la participation de certains Etats industrialisés à ses travaux et leur adhésion à l'Acte final de la 3ème Conférence, elle ne fut pas en mesure de corriger les «insuffisances» et «imperfections» de la Partie XI et des annexes III et IV relatives au régime international([68]). Une démarche parallèle à ses travaux allait donc s'imposer. C'est une procédure officieuse qui prit le départ avec l'initiative du Secrétaire Général des Nations Unies le 19 juillet 1990. Grâce à un tour d'horizon groupant les déclarations officieuses des Etats signataires et non signataires de la Convention, on a pu identifier les problèmes constituant les véritables obstacles à l'universalisation de la Convention ainsi que les solutions possibles. L'aboutissement fut l'Accord de juillet 1994 véhiculé par une résolution de l'Assemblée Générale des Nations Unies (A/Res/48/263) ([69]), qui modifie substantiellement la partie XI de la Convention relative à l’exploitation et à la gestion internationale des fonds marins.

 

b- Valeur juridique de la Résolution (A/Res/48/263)

L'exigence de la rapidité doublée de la lenteur des procédures constitutionnelles internes auxquelles devaient se plier les Etats industrialisés sous-tendaient le choix d'une résolution de l'Assemblée Générale des Nations Unies comme véhicule de l'Accord de juillet 1994. Il s'agit, en fait,«d'une solution d'attente permettant à ces Etats de participer aux travaux de l'Autorité dès sa mise en place, mais surtout à la prise des décisions, en particulier à l'élection des principaux organes» ([70]).

Le texte de l'Accord relatif à l'application de la Partie XI, fut adopté le 28 juillet 1994 par l'Assemblée Générale des Nations Unies: 121 oui, 7 abstentions, zéro non et 50 absents. Ce texte – qui réforme profondément les règles instaurées par la partie XI sans toucher, en apparence, aux principes qui avaient présidé à son élaboration – est soumis à ratification (quorum: 40 Etats dont sept investisseurs pionniers et parmi eux, cinq devant être des Etats industrialisés).

Sans nous arrêter ici à une analyse détaillée de l'Accord qui a fait et fera couler beaucoup d'encre ([71]), nous nous limiterons à envisager la portée de la résolution 48/263 et sa contribution aux sources du nouveau droit de la mer.

Si les résolutions n'ont fréquemment que valeur de recommandation, elles ont parfois le caractère de décisions, soit conditionnelles, soit inconditionnelles. Les recommandations de l'Assemblée Générale doivent être considérées comme des invitations, des incitations. Elles ont un caractère exhortatoire. Les Etats membres que les recommandations concernent, ont toute lattitude de ne pas les suivre sous condition, toutefois, de faire savoir leur non-conformité à ces actes et en exposer les motifs (Il en est ainsi même dans certaines résolutions de principe, telle, par exemple: la Résolution 2749 (XXV) où certains Etats industrialisés ont refusé, après son adoption, l'application des principes relatifs à la mise en marche du mécanisme institutionnel pour l'exploitation et la gestion des fonds marins.Egalement les résolutions I et II portant création de la Commission préparatoire et sa compétence en ce qui concerne la protection des investissements préliminaires.(Ici, les Etats-Unis n'ont pas adhéré à l'Acte final de la 3ème Conférence et ont fait parvenir à la Commission leur refus motivé de participer à ses travaux).

Néanmoins, les résolutions - fruit d'une négociation de groupe à groupe menées dès leur phase préparatoire au sein de comités restreints, prolongées, par la suite au sein de l'organe plénier - peuvent avoir un caractère décisionnel, surtout que les grandes résolutions sont de plus en plus discutées et votées article par article, et les délégations des Etats procèdent souvent à des explications de leurs votes, livrant ainsi plus précisément la teneur de leur opinion sur la norme en débat. Il s'agit, dès lors, quoique, sans doute, sous une forme atténuée, de l'expression d'une rencontre de volontés facilitée par le cadre organique de son intervention. On a pu considérer, à raison, que la rencontre des volontés permise par la négociation multilatérale de telles résolutions, constitue l'expression d'un accord politique réalisé entre les Etats qui ont participé à l'adoption de la résolution. Ainsi, et dans la mesure où elles comportent des engagements précis à la charge des Etats, on doit considérer que «ces engagements lient politiquement les Etats qui les ont acceptés» ([72]).

En ce qui concerne la résolution A/Res/263, l'article 4 de l'Accord prévoit simplement, «qu'après l'adoption du présent Accord, tout instrument de ratification ou de confirmation formelle de la Convention ou d'adhésion à celle-ci vaudra également consentement à être lié par ledit Accord. Autrement dit, l'Accord facilite d'un côté la participation des Etats en permettant à ceux déjà Parties à la Convention de se rallier à l'Accord selon une procédure simplifiée, sans être astreints de retourner devant leurs autorités nationales compétentes, et aux Etats non Parties de se rallier à la Convention expurgée de ses dispositions redhibitoires visant l'exploitation des fonds marins. D'un autre côté, il maintient des règles contraignantes en particulier, celles qui attribuent aux Etats industrialisés un poids particulier pour l'entrée en vigueur de l'Accord qui ne pourra se faire qu'avec leur participation. Par conséquent, si l'objectif était d'éviter une dualité de régimes avec une «dilution de la qualité d'Etats Parties» ([73]), le but principal, d'essence politique, consistait à rassembler le plus grand nombre d'Etats, allant jusqu'à confier à l'adoption d'une résolution des effets juridiques sans précédents. Ainsi, après avoir consenti à appliquer provisoirement l'Accord, 135 Etats allaient participer, en tant que membres, à l'installation solennelle de l'Autorité internationale des fonds marins à Kingston (à la Jamaïque) alors que sans ce consentement à l'Accord, seuls les 68 Etats Parties à la Convention au 16 novembre 1994, jour de l'entrée en vigueur de celle-ci, auraient pu participer à sa première session ([74]).

Est-ce à dire que la Résolution (A/Res/263) revêt la force juridique obligatoire d'une source du droit de la mer? La réponse est sûrement négative surtout que les pays industrialisés - qui furent les premiers à signer cette Résolution portant modification de la Partie XI qui les empêchait jusque-là d'adhérer à la Convention – n'ont pas accepté le projet dit «papier-bateau» qui conférait, à la Résolution, en vue d'accélérer le processus, la double fonction de l'adoption et de l'authentification. Autrement dit, les Etats industrialisés – qui n'étaient pas prêts à bafouer toutes les règles du droit des traités avec toutes les conséquences que cela pourrait impliquer, pour conclure un accord et aboutir aux solutions recherchées – refusaient de sacrifier la sécurité juridique au compromis politique. Dès lors, si cette Résolution offre au niveau de la substance, des avantages importants ouvrant la voie en particulier aux membres de l'Autorité à titre provisoire, de patronner une application pour l'approbation d'un plan de travail d'exploration, permettant ainsi aux Etats demandeurs potentiels tels les Etats-Unis et l'Allemagne de passer des contrats d'exploration; il n'en demeure pas moins que la manifestation du consentement d'adhésion à l'Accord – soit par la signature définitive, soit par la signature sous réserve de ratification conformément à l'article 4 de l'Accord, soit encore par la signature assujettie à la procédure simplifiée visée à l'article 5, inspirée de l'article 313 de la Convention – constitue plutôt l'expression d'un «accord politique» réalisé entre les Etats qui ont participé à l'adoption de la résolution.

Dès lors, si l'adoption de la résolution par l'Assemblée Générale reste maintenue en tant qu'acte de nature à produire des effets juridiques, les engagements qui en découlent ne peuvent lier que politiquement les Etats qui les ont acceptés. L'article 6 de l'Accord est très significatif à cet égard ([75]). Il subordonne, en effet, l'entrée en vigueur de l'Accord à l'engagement des Etats industrialisés qui détiennent la technique et les moyens financiers pour investir dans les fonds marins. Autrement dit, ces exigences supplémentaires requises par l'Accord pour son entrée en vigueur correspondent plutôt à la réalité politique et économique. En effet, la raison fondamentale qui a empêché l'entrée en vigueur de la Convention en 1982 est dûe au refus des pays Tiers mondistes de subordonner cette entrée en vigueur à un coefficient particulier qui avait été brièvement envisagé lors de la discussion des clauses finales à savoir l'adhésion des 7 Etats visés à la résolution II de la 3ème Conférence étant entendu que 5 d'entre eux devaient être des Etats développés. Cette attitude avait, à l'époque, des motivations politiques refusant de lier le sort de la Convention à la volonté d'une minorité d'Etats.

Or, la situation politique en 1994 n'étant plus la même, les bouleversements profonds qu'a subis la société internationale a fait peser la balance du côté des industrialisés faisant ébranler toute l'idéologie des années soixante-dix qui avaient présidé à la rédaction de la Partie XI de la Convention. «C'est l'approche pragmatique et réaliste qui va dominer en confiant un rôle prépondérant, au sein de l'Autorité, aux Etats susceptibles dans les dix ans à venir à mener des activités d'exploration des fonds marins» ([76]). C'est, donc, le politique qui donne à la résolution (A/Res/263) véhiculant l'Accord de juillet 1994 sa force et son poids. Sans nul doute, l'Accord qui en est résulté représente, «un effort important en faveur de l'universalisme de la Convention». Tout le monde s'est réjouit, de la signature de l'Accord par les Etats-Unis ainsi que de leur vote en faveur de la Résolution (A/ Res/ 49/28) sur le droit de la mer adoptée le 9 décembre 1994 par l'Assemblée Générale, de même que l'accession de l'Allemagne suivie de peu par la ratification de l'Australie et celle de l'Italie «marquant ainsi le ralliement des Etats industrialisés et le renouveau de leur intérêt porté à la Convention qui constitue, aujourd'hui, le code juridique des mers le plus élaboré» ([77]).

Par conséquent, si la résolution caractérisée par la souplesse des principes qu'elle édicte – s'avère de plus en plus sollicitée tant par les Tiers-mondistes qui l'ont largement utilisée soit, pour dénoncer l'injustice des solutions établies dans l'ordre politique et économique soit, pour affirmer, grâce à leur nombre, leur place décisionnelle dans la création de nouvelles situations juridiques survenues sur la scène internationale dans la décennie soixante dix; que par les Etats industrialisés qui apprécient depuis qu'ils ont la maîtrise politique du monde la rapidité et la souplesse de cet instrument qui leur fait éviter la lenteur et la lourdeur des procédures constitutionnelles internes sur des questions qu'ils considèrent d'intérêt vital et qui ont besoin de décisions rapides pour les mettre en route. Il reste que cette procédure est toujours frappé par son caractère incomplet.

Encore située sur le plan politique qui entame un processus de transformation de la conscience juridique universelle dont la durée et le dénouement restent conditionnés par l'évolution des circonstances, la résolution ne peut s'élever au niveau des sources du droit international de la mer que si elle est complétée soit dans une convention soit dans une règle coutumière. Elle n'est donc pas une source du droit mais elle prépare la survenance d'une source obligatoire du droit international. Avec la résolution nous nous trouvons, comme dit le Professeur R.J. Dupuy, dans «des zones de croissance d'un droit de finalité qui va à l'encontre des traditions et dont le mouvement ne peut s'affirmer qu'avec le règlement progressif des contradictions qui contrarient l'avènement toujours inachevé, de la communauté internationale» ([78]).

 

Conclusion

Pour conclure nous pouvons dire que l’opération de refonte du droit classique de la mer s’inscrit dans “ce processus continu d'avancée normative” qui a marqué l'évolution des modes de formation du droit, un des phénomènes les plus marquants du droit international contemporain. Pour faire face à un problème très concret de productivité normative, le système international devait se transformer, afin d'essayer de répondre à une augmentation de la demande du droit dont le rythme des procédures classiques de sécrétion de la norme ne permettait plus de satisfaire.

C'est dans ce contexte d'évolution qu'une “percée rénovatrice” s'est faite, d'abord, comme nous le verrons au prochain article au niveau des modes classiques: traité ou coutume. Cette évolution n'a, certes, pas eu pour effet de rendre ces modes de formation du droit international caducs ou obsolètes, mais c'est, plutôt, le contexte socio-juridique de leur intervention qui s'est profondément transformé. Aussi, les conditions de leurs rapports réciproques, leurs procédures: ces modes respectives d'élaboration du droit de la mer et la portée qui leur est conférée devant être remise en cause, se sont considérablement enrichies et complexifiées. Autrement dit, c'est une nouvelle vision des normes qui s'est effectuée à la lumière des nouveaux facteurs et des nouvelles dimensions qui ont bouleversé la société internationale en marche.

Dans ce nouveau processus, ce sont surtout les résolutions qui constituent l'apport le plus manifeste quant à l'élaboration du nouveau droit de la mer. Dotés d'une capacité d'adaptation plus grande aux besoins nouveaux dans toute leur ampleur, leurs dimensions et les implications de leurs objectifs qui sont sans commune mesure avec la Société d'avant 1945, les résolutions pourraient couvrir, à côté de certains domaines traditionnels, comme celui du maintien de la paix ou de l'organisation des relations amicales, une multitude de domaines nouveaux tels que, à titre d'exemples, le développement industriel, les échanges technologiques, la protection de l'environnement, ou bien encore la défense des droits de l'homme, la télédiffusion spatiale, l'exploration et l'utilisation de l'espace extra-atmosphérique et, plus particulièrement l'exploration et l'exploitation des fonds marins, qui relèvent de ces instruments juridiques nouveaux et qu'on qualifie indifféremment de résolutions, recommandations etc...

Evoquant l'ambiguïté de leur statut comme l'imprécision de leur portée, on a pu parler, à leur égard, de «non-droit», de «pré-droit» ou d'une «soft law» ([79]) dont la traduction en français souligne, la contradiction voulue dans les termes: droit «mou», “souple”, sinon «invertébré», droit «vert» parce qu'encore inabouti; bref, droit pas encore obligatoire! ([80]). Et, la question s'est alors posée de savoir si cette redondance résolutionnaire pouvait avoir une incidence directe sur l'évolution du contenu du droit international général? Un premier courant de doctrine s'est contenté d'affirmer que «pas plus qu'avec trois fois rien on ne fait quelque chose, l'accumulation de non-droit ou de pré-droit ne suffit à elle seule à créer du droit» ([81]); alors que d'autres considéraient que l'apparition de ces textes non conventionnels «constitue l'expression des tendances, de l'évolution des mentalités juridiques dans le domaine concerné», car et selon cette thèse, l'adoption répétée et rapprochée des mêmes règles martellent et façonnent les mentalités, hâtant ainsi la genèse normative. Si elle vient à son heure et exprime un véritable besoin social, chaque résolution contribue ainsi à la catalyse de la coutume(5). Mais encore faut-il, que la composition des votes reflète de façon représentative l'assentiment des différentes catégories d'Etats composant la communauté internationale. Cette dernière condition sera peut-être plus facilement accessible dans l'avenir, étant donné la disparition à peu près complète du bloc socialiste. D'autres coalitions sont cependant susceptibles de se constituer et l'on touche à l'un des domaines où l'évolution du droit et de ses modes de formation est largement tributaire de facteurs politiques et économiques.

 

Indications bibliographiques complémentaires

Blix (H.) & Skubizewski (k.)

"Les techniques d’élaboration des grandes conventions multilatérales et des normes quasi - législatives internationales" (Rapporteurs). Annuaire de l’IDI, session d’oslo, vol. 5/ 11, pp. 36- 105 (Bâle, éd.Karger S.A., 1978).

Elias (T.O.)

“Modern sources         in international law”, Essays in honor of Ph. Jessup (New York / Londres, Columbia University press 1972).

Saba (H.)

“l’activité quasi - législative des institutions spécialisées des Nations Unies” (RCADI, 1964/1,vol. 111, pp. 603- 690).

Skubizewski (k.)

- L’élaboration des grandes conventions multilatérales et des instruments non conventionnels à fonction ou à vocation normative. - Les résolutions de l’Assemblée Générale des  Nations Unies”(Rapporteur) Annnuaire de l’IDI, session d’Helsinski (vol 61/ I, pp, 257-267) - Paris, Pedone 1987.

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“Textes internationaux ayant une portée juridique dans les relations mutuelles entre leurs auteurs et textes qui en sont dépourvus” (Rapporteur). - Annuaire de l’IDI, session de Cambridge (vol. 60/I, pp. 166-374) Rapport définitif pp. 358-358. (vol.60 /11, pp. 117-154, pp. 284-291) Paris, Pedone 1984. - “ Résolution et accord international”, in Essays in International Law in Honor of Judge Manfred Lachs, Nijhoff, La Haye, 1984, p. 305.


[1] Voici quelques textes anciens qui illustrent les usages et coutumes qui ont gouverné la mer pendant longtemps : “ le code Maritime Rhodien” rédigé sans doute vers le 3ème ou 2ème millénnaire avant J.C. et qui s’impose en Méditerrannée sous l’Empire Romain; la “Bazilika” - code maritime byzantin suivi au Levant entre le 7ème et le 12ème siècle; les

“ Tables d’Amalfi ” qui remontent au 10ème siècle; le “Digestes de Justinien”; le “Roles d’Oléron”; les Assises de Jérusalem”; le “Consultat de la Mer”; le “ Guidon de la Mer”; etc... Tous ces textes sont profondément marqués par l’inscurité de l’expédition maritime.

Les règles du “Cérémonial Maritime” qui constituaient des usages observés par ou à l’égard des flottes de guerre (“ l’exigence du Salut” par exemple), s’inscrivaient dans une opération de contrôle sur les navires et sur leur pavillon en vue. de réprimer la “piraterie”. ( La  piraterie a été le phénomène historique le plus constant pendant deux millénaires. Et la distinction même entre “piraterie” et “négoce” est restée longtemps imprécise : Phéniciens, Grecs,Carthaginoires pratiquaient tantô l’une tantôt l’autre.

[2] C’est à son propos qu’à été forgée l’expression de “jus communicationis” utilisée par les théologiens espagnols après les grandes découvertes. C’est à travers les sillages toujours recommencés de navigants, que s’est établi un corps de règles coutumières qui n’a été codifié qu’en 1958.

[3] Grotius l’un des pères fondateurs du droit international contemporain s’est intéressé d’abord aux questions maritimes. Avant de publier, en 1625, son fameux traité sur le “Droit de la Guerre et de la Paix” (De jure belli ac pacis), il avait rédigé un ouvrage sur la liberté des mers (“Mare Liberum”, 1608), auquel devait répobndre plusieurs années après le juriste anglais Selden dans son livre (“Mare Clausum”, 1635).

[4] Voir sur les aspects historiques : A. Raested : “La mer territoriale; études historiques”, Paris, Pedone, 1913, A. de la Pradelle, “Le droit et l’Etat sur la mer territoriale”R.G.D.I.P., 1898, p. 264 et 309.

[5] On a  pu soutenir que le premier essai de codification des principes de droit international de la mer fut tenté au Congrès de Paris en 1856, réuni à la suite de la guerre de Crimée. Les principes contenus dans la Déclaration de Paris furent très largement suivis, même par les Etats-Unis qui pourtant n’étaient pas signataires (ef, Colombos, “ International Law of the sea, 6em édition, p. 20).

[6] ef. Guerrero, “La Codification du droit international”, Paris, Pedone 1930; voir plus particulièrement, Reeves, “The codification of The Law of territorial Waters”, A.J.I.L. 1930, p, 487; Liais, “Considérations”, R.G.D.I.P. 1931. p, 218.

[7] ef. Y. Daudet. Les Conférences des Nations Unies sur la codifications du droit international L.G.D. J. 1968.

[8] ef. sur la C.D.I. Doc A/CN 4/4 du 2 février 1949; Sir Cecil Hurt A plea for the codification of international Law on new livres -in Transactions of the Grotius Society- vol. 32 p. 135. sur les travaux de la C.D.I. ef. Chronique J. Dehaussy ,  A.F.D.I. 1956 p. 588.

[9] ef. S. Bastid, “Observations sur une étape dans le développement progressif et la codification des principes du droit international “, in Mélanges en hommage  à P. Guggenheim, Genève, 1968 p. 132. Voir également A. Gros. “ Entre deux conférences sur le droit de la mer” , in Hommage d’une génération de juristes au Président Basdevant, Paris, Pedone, 1960, p. 237.

[10] Lorsqu’en 1967 l’Anbassadeur Pardo posa aux Nations Unies la question qui devait déclencher le processus révisionniste : “ A qui appartient le fond des mers?”. Et de répondre “qu’il est l’héritage commun de l’humanité”. La majorité des Nations Unies devait le suivre et engager des négociations pour organiser la gestion de ce patrimoine collectif.

[11] Les nodules polymétatiques qui parsèment le fond des océans contiennent du manganèse, du nickel, du cuivre, du cobalt, de l’aluminuim dans des proportions quasiment inépuisables dans un avenir prévisible.

[12] cf. M.Virally, in, “L’exploitation des ressources minérales des fonds marins...”, V.G. de Font bruné Préface, p, IX, Paris, Pedone, 1985.

[13] cf. Résolution 2750 e (XXV) du 17 décembre 1970, aux termes de laquelle “le fond des mers et des océans, ainsi que leur sous-sol, au-delà des limites de la juridiction nationale (ci-après dénommés la Zone) sont patrimoine commun de l’humanité.Cette Résolution fut précédée par une Résolution 2754 (XXIV) du 15 décembre 1969, dite “Moratoire” demandant aux Etats et aux entreprises de s’abstenir de toute activité d’exploitation en attendant la mise en place d’un régime international. En outre, à l’initiativité des Etats-Unis et de l’URSS un projet de traité sur la dénucléarisation des fonds marins fut discuté aux Nations Unies et ouvert à la signature et à la ratification en 1970 (Résolution A/Res/ 2660 du 7 novembre 1970.

[14] Si la Convention du 10 décembre 1982 a reçu 119 signatures, on ne peut que rappeler ici que 22 Etats ne l’ont pas signée dont les plus importants du point de vue de la technologie océanique (tels les Etats-Unis, l’ex-R.F.A., le R.U., l’Italie, le Japon. Ce dernier devait changer d’attitude ultérieurement). Dix-sept Etats se sont abstenus (tels l’U.R.S.S., huit Etats socialistes, six Etats de la C.E.E.: Belgique, Italie, Luxembourg, Pays-Bas, ex. R.F.A. et R.u, la Thaïlande et l’Espagn, et plusieurs pays d’Amérique Latine pour des raisons tenant à la notion de Z.E.E).

[15] L’entrée en vigueur officielle de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer est rendue possible en raison du dépôt, douze mois auparavant du soixantième instrument de ratification par la République coopérative de Guyana. Le retard est dû à la lenteur des ratifications provoquée par l’institutionnalisation très poussée des fonds marins, souhaitée par les P.V.D. et refusée par les industrialisés. On doit rappeler ici que la 3ème Conférence a eu recours à la procédure de vote en 1982 bien qu’elle avait décidé le 27 juin 1974: “ La Conférence ne doit ménager aucun effort pour aboutir à un accord sur les questions de fond par la voiie de consensus et il n’y aura pas de vote sur ces questions tant que tous les efforts en vue d’aboutir à un consensus n’auront pas été épuisés”.

Il s’y ajoute que si le nombre élevé de signataire de la Convention avaient constitué, en 1982, un succès certain, ce succès n’était que relatif parce que vingt-deux Etats n’avaient pas signé la Convention de Montego Bay de la technologie océanique comme les Etats-Unis, l’ex R.F.A., le R.U., le japon qui devait changer d’attitude ultérieurement. Cela s’est, en effet, répercuté sur l’entrée en vigueur de cette Convention qui n’a pu avoir lieu qu’avec l’affirmation de la thèse libérale en 1994 avec l’adoption de l’Accord de juillet relatif à la Partie IX de la Convention portant sur la question épineuse de la gestion des fonds marins.

[16] cf. R.J. Dupuy “L’océan partagé”, Paris, Pedone 1979, p 20.

[17] cf. M. Virally, 1985, op. cit., p. X.

[18] cf. La Résolution 2750 c (XXV) déjà citée; L’Acte final de Montego - Bay  : La Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, et les Résolutions I et II relativves à la créations de la Commission préparatoire et à la protection des investissements préliminaires; ainsi que la Résolution (A/ Res/48/263): Accord de juillet 1994 relatif à l’application de la Partie XI de la Convention des N.U. sur le droit de la mer du 10 décembre 1980.

[19] Voir R.J. Dupuy, “Droit déclaratoire et droit programmatoire: de la coutume sage à la “Soft Law”, in, l’élaboration du droit international public, Colloque, S.F.D.I., 1975, p. 132. Voir également, R. Ida, “Formation des normes internationales dans un mode en mutation : critique de la notion de soft Law”, in,  Mélanges M. Virally, Paris, Pedone 1990, p. 333 et s.; Voir aussi, M. Virally, “ A propos de la lex ferenda”, in, Mélanges offerts à P. Reuter, Paris, Pedone  1981, p. 519 et s.

[20] cf Combacau et Sur , 1993 , op . cit ; p . 64.

[21] cf. résolution A/2749 (XXV) du 17 décembre 1970.

[22] cf. Résolution A/Res/263 portant création de l’Accord de juillet 1994.

[23] cf. L.Lucchini et M.Voelckel “Droit de la Mer” T.I, 1990 et T.II, 1996, Paris, Pedone.

[24] cf. J.P. Queneudec “Flux et reflux en droit international”, R.G.D.I.P. 1997/1 pp.      249 - 252.

[25] cf. P. Weil, “Cours général de droit international public “ R.C.A.D.I. 1992, VI.

[26] Voir, R.J. Dupuy, “Droit déclaratoire et droit programmatoire; de la coutume sauvage à la “Soft Law”, Colloque de Toulouse, Pedone 1975, p. 132-148; “Coutume sage et coutume sauvage”, Mélanges Rousseau, Pedone 1974, pp. 77-87; M.Virally, “La Valeur juridique des recommandations des organisations internationales”, A.F.D.I; 1956, P. 66 et s.; G. Castanêda,“La Valeur juridique des résolutions des Nations Unies” R.C.A.D.I., 1970, I,p.129; Voir plus récemment l’article d’A. de Marffy, “Le cadre juridique de l’Accord relatif à l’application de la Convention sur le droit de la mer”, Espaces et Ressources Maritimes, vol.7,1994, pp. 37-50.

[27] cf. Résolution 17 07 (XVI) du 19 décembre 1961.

[28] cf. Résolution 3201 (XVI), 3202 (SVI) et 3281 (XXIX), de l’année 1974. Voir pour les commentaires sur le Nouvel ordre économique international : B. Stern, “Pour un nouvel ordre économique international? avec les principaux textes, Economica 1983, M. Bedjaoui, “Pour un Nouvel ordre économique international”, UNESCO, Paris  1979.

[29] cf.1 ère décennie : résolution 1710 (XVI) et 1715 (XVI) du 19 décembre 1961; 2ème décennie : résolution 2626 (XXV) du 24 octobre 1970; 3ème décennie: résolution (35/56)  du 5 décembre 1980; 4ème décennie: résolution (45/199) du 21 décembre 1990 in, M. Flory, “ Mondialisation et droit  international du développement”, R.G.D.I.P; 1997 - 3; et pour les commentaires des décennies, voir les commentaires faits par M.Virally, puis M.Flory, A.F.D.I. 197 0 p. 9; A.F.D.I. 1980, p. 593; A.F.D.I., 1990 p. 606.

[30] cf. M. Flory, 1997, op.cit, p.630.

[31] cf, R.J. Dupuy. “ Coutume sage, coutume sauvage”, op; cit. p. 75 à 87.

[32] Voir, Textes et conditions d'adoption dans, B. Stern, «un Nouvel Ordre économique international», Paris, Pedone, 1983, pp. 178 - 183.

[33] La Résolution 2749 (XXV) fut adoptée par 108 voix avec 14 abstensions, mais sans vote contraire.

[34] cf. R. J. Dupuy, «coutume sage et coutume sauvage», op. cit.

[35] cf. M. Virally, «Le rôle des principes dans le développement du droit international», in Hommage à Guggenheïm, I.H.E.I., Genève 1968, p. 533 et s.; cf. également, S. Bastid, «Observations sur une étape» dans le développement progressif et la codification des principes de droit international», Ibid, p. 132 et s.

[36] Ces expressions sont empruntées au Professeur R.J. Dupuy.

[37] cf. Ch. de Visscher, «Théories et réalités en droit international», éd, Pedone, 1970, pp. 180 - 181.

[38] cf. à ce propos, M. Virally s'interrogeant sur la valeur juridique du texte de la Décennie pour le développement; l'auteur pense que les facteurs moraux et politiques gardent leur importance dans les rapports internationaux (ef. «La Décennie des N.U. pour le développement, Essai d'interprétation para-juridique», A.F.D.I., 1970, p. 9).

[39] cf. J. Castanêda, Valeur juridique des résolutions des Nations Unies, R.C.A.D.I., 1970, p. 205.

[40] cf. J. Castanêda, Valeur juridique des résolutions des Nations Unies, R.C.A.D.I., 1970, p. 205.

[41] cf. R.J. Dupuy, Op. cit, p. 139 et p. 144 - 145.

[42] cf. G. BENAR et J. DEHAUSSY, dans «la coutume», Juris-classeur de droit international; Fax 13 B, n؛. 76.

[43] Lino Di Qual, Les effets des résolutions des Nations Unis. L.G.D.J., 1987, p. 251.

[44] cf. sur la question du consensus, du fait majoritaire, du problème des abstentions, M. Virally, «Droit international et décolonisation devant les Nations Unies», 1963, p. 508, et plus particulièrement p. 533, 539 et 540.

[45] cf. M. Virally, «Droit international et décolonisation devant les N,U.», Op. cit, p. 508, et plus particulièrement de la page 533 à 541. L'auteur analyse les différentes thèses en présence. Pour les tenants de l'illégalité de l'action des Nations Unies dans le domaine de la décolonisation, il s'agit d'un «pseudo-droit»; pour les Etats du Tiers-Monde, il s'agit d'un droit positif et ces règles doivent être obligatoires pour les Etats membres; la position de l'auteur se situe entre ces deux affirmations. Il s'agit, pour lui, en définitive d'un «droit en devenir». Il conclut sur la question en disant «que le développement de la pratique des N.U. permet une singulière accélération du processus de la coutume; il n'en modifie pas la nature». Voir également dans ce sens, Jung-Gun Kim, «La Validité des résolutions de l'Assemblée Générale des Nations Unies», R.G.D.I.P., 1971, p. 92 et plus particulièrement p. 99.

[46] Nous rappelons ici que la «Déclaration des principes» a été adoptée par 108 voix pour, 14 abstentions et aucune opposition.

[47] Voir, E. Langavant, «Les Législations nationales sur les ressources minérales des fonds marins», E. Langavant et J. Martinerie et Bendedouche, «Droit maritime français», février mars 1983, n؛ 410, 411, p. 67 - 81/ p. 131 - 142, p. 73; R. Goy, Rapport général, in Perspectives du droit de la mer...” Paris, pedone 1984,p.38.

[48] Nous rappelons que le Moratoire fut adoptée par 62 voix pour, avec 28 abstentions et 28 voix contre.

[49] J. Castanêda, «Valeur juridique des Résolutions des Nations Unies», Op. cit.,p. 207 - 331 et p. 313.

[50] cf. R.J. Dupuy, R.C.A.D.I. 1983, T. I, chap. 2, p. 38; note 15, et «Droit de la mer et droits sur la mer», R.I.R.I. hiver 1975 - 1976, n؛ 5/6, pp. 29 - 38, pp. 34 et 35.

[51] Guy de La Charrière écrit: «Au contraire, pour autant qu'il existe une pratique en ces matières, elle se caractérise par des conduites tendant à l'exploitation de la part de ceux qui sont en mesure d'y procéder». G. de La Charrière, 1980, Op. cit.,  note 35, p. 667.

[52] E. Langavant, et J. M. Bendedouche, «Les législations nationales sur les ressources minérales des grands fonds marins», Journal de la Marine marchande, 1983, p. 76.

[53] L'article 53 de la Convention de Vienne dispose, «... Aux fins de la présente convention, une norme impérative de droit international général est une norme acceptée et reconnue par la Communauté Internationale des Etats dans son ensemble en tant que norme à laquelle aucune dérogation n'est permise et qui ne peut être modifiée que par une nouvelle norme de droit international général ayant le même caractère».

[54] Voir notamment, R.J. Dupuy 1974, p. 86, 1975, pp. 139, 145; J.P. Lévy, 1975, p. 899; M. Virally, p. 525; R. Goy. 1983, p.40.

[55] cf.M. Virally, ‘A propos de la Lex Ferenda”, Mélanges, Reuter, 1981.

[56] cf. Caflisch «La révision du droit international de la mer» Annuaire Suisse de droit international, 1973, p. 58.

[57] cf. E. Langavant & J. Martinerie - Bendedouche, «Les législations nationales sur les ressources minérales des grands fonds marins», Journal de la Marine marchande, 1983, p. 75. (op. cit.)

[58] cf. P. Weil, «vers une normativité relative en droit international», R.G.D.I.P., 1982, pp. 5-47, ad. pp. 12 et 45.

[59] - K. Skibiszewski, «La nature juridique de la Déclaration des principes sur les fonds marins», A.E.I., 1973, p. 248.

 

[60] cf. T. Trêves «La protection des investissements préparatoires et la Résolution n؛ 2 de la Conférence sur le droit de la mer», A.F.D.I., 1982, p. 851 - 872; p. 852 et 853.

 

[61] Doc. IA1 du 2 avril 1980 (changement d'attitude des Etats-Unis).

 

[62] Le Président de la Conférence communiqua une note explicative sur le sujet lors d'une réunion officieuse convoquée avant le début de la 11e session: Document TPIC/1 du 8 mars 1982: «Traitement à accorder aux investissements préparatoires compatibles avec la Convention (82 - 05585 - 0088 m (E)).

[63] Doc. T.P.I.C./2 du 15 mars 1982: «Federal Republic of Germany, Japon, United, Kington, and United States of America: Proposal ou preparatory investment protection» (82 - 06079 - 02 44 j (E)).

[64] Doc. T.P.I.C./3, 19 mars 1982: «Draft Resolution governing preparatory investment in the sea-bed area submitted by the group of «77» (82 - 06832).

[65] cf. Doc. T.P.I.C./4 du 22 mars 1982: «Proposition de la France pour faciliter la mise en place de l'Entreprise dès l'entrée en vigueur de la Convention». (82 - 07 - 58) et T.P.I.C./5 du 25 mars 1982: «Draft Resolution governing préparatory investment in the sea bed area. «Head of the delegations of Australia, Canada, Danemark of Nor-way on behalf a groupe of ten heads of delegations (82 - 03461 et 34 - 8B - CE).

[66] Un projet de résolution fut établi par les co-présidents des réunions de négociations qui fut soumis à la procédure d'amendement et le Président de la Conférence établit les derniers projets (ef. Trêves, Op. cit., note 2, 2e P., T. II, ch. 2, p. 853).

 

[67] cf. E. Jarmache, «La Résolution II de l'Acte final de la troisième Conférence des Nations Unies sur le droit de la mer», Espaces et Ressources maritimes, 1988, N؛ 3, P.U.F., Paris, p. 30.

 

[68]cf. J.P. Lévy, «Les bons offices du Secrétaire Général des Nations Unies en faveur de l'universalité de la Convention sur le droit de la mer», R.C.D.I.P., n؛ 4/1994, p. 874.

[69] Doc. UN. A/Res/263, publié dans le Bulletin du Droit de la Mer, Numéro spécial IV, 16 novembre 1994

[70] cf. A. de Marffy - Mantuano, «Le cadre juridique de l'Accord relatif à l'application de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer et ses ambiguités», Espaces et Ressources maritimes, n؛ 8, 1994, p. 40.

[71] J.P. Queneudec, «Le nouveau droit de la mer est arrivé», R.G.D.I.P., n؛ 4 - 1994; pp. 866-870; J.P. Lévy, «La préparation de l'Accord....», op. cit., R.G.D.I.P. 1994, pp. 871 - 897; T. Trêves «L'entrée en vigueur de la Convention...» op. cit. A.F.D.I. 1993, pp. 851 - 873; A. de Marffy, «Le cadre juridique de l'Accord...» op. cit., Espaces et Ressources maritimes 1995, pp. 37 - 50; D. Vignes, «Absence de visibilité sur la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer», Espaces et Ressources maritimes, 1995, p. 1-5; J.P. Beurrier & P. Cadenat, «L'entrée en vigueur de la Convention...». Espaces et Ressources maritimes, 1995, pp. 22-36

[72] cf. M. Virally, Résolutions et accord international», in Essays in International Law in Honor of Judge Manfred Lachs, Nijhoff, La Haye, 1984, p. 305.

 

[73] «Le concept de Parties à la Convention a été profondément dévalué par l'ouverture des consultations à tous les Etats dont les travaux s'effectuent sur la base de la règle du consensus», ef. J.P. Pulvénis, «New problems arising from the entry into force of the 1982 convention on the law of the sea, some observations on the situation of developing countries», to be published in 1995 by Nijhoff.

[74] Au 31 janvier 1995, 115 Etats ont consenti à appliquer l'Accord provisoirement. Au vu des effets produits par l'adoption de l'Accord, un vote enregistré fut demandé d'identifier les Etats qui, ayant consenti à l'adoption de l'Accord, sont devenus provisoirement Parties à celui-ci. Le 28 juillet, 121 Etats votèrent en faveur de la résolution; 43 étaient des Etats contractants, membres «ipso facto» de l'Autorité conformément à l'Article 156 de la Convention. 75 Etats non-Parties pouvaient ainsi devenir membres à titre provisoire de l'Autorité à l'exception de ceux qui par écrit notifièrent le dépositaire qu'ils n'appliqueraient pas provisoirement l'Accord conformément à l'article 7 (cf. A. de Marffy, l'article précité, p. 45).

[75] Le présent Accord entrera en vigueur 30 jours après la date à laquelle 40 Etats auront établi leur consentement à être liés conformément aux articles 4 et 5, étant entendu qu'au nombre de ces Etats doivent figurer au moins sept des Etats visés au paragraphe 1, lettre a) de la résolution II de la 3ème Conférence des Nations Unies sur le droit de la mer et qu'au moins cinq d'entre eux doivent être des pays développées

[76] Voir sur ce point, Mme de Marffy «L'application de la Convention», op. cit., et J.P. Lévy, «La préparation de l'Accord de juillet 1994», op. cit.

 

[77] cf. A. de Marffy; «Le cadre juridique de l'Accord relatif à l'application de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer et ses ambiguités», op. cit., p. 49.

[78] cf. R.J. Dupuy, Cours général de droit international public. «Communauté internationale et disparités de développement», R.C.A.D.I., 1983, T1, Chap. 2, p. 40.

[79] cf. P.M. Dupuy, Op. cit., p. 285

[80] Voir sur l'ensemble de la question, R.J. Dupuy, Droit déclaratoire et droit programmatoire: de la coutume sauvage la «Soft Law», in l'élaboration du droit international public, Colloque, S.F.D.I. 1975, Op. cit., p. 132 et s., R. Ida, formation des normes internationales dans un monde des normes internationales dans un monde en mutation: critique de la notion de «Soft Law», in Mélanges M. Virally, Paris, Pedone 1990, p 333 et s

[81] cf. P. Weil «vers une normativité relative en droit international» Op. cit, R.G.D.I.P., 1982, p. 12